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15 juillet 2011 5 15 /07 /juillet /2011 23:27
 
Qu’a-t-on le droit de lire dans un centre de rétention ?


[Par MATHIEU RIGOUSTE Sociologue]

Mon ami H. n’a pas de papiers. Il vit en France depuis plusieurs années,
il effectue toutes les basses œuvres sous-payées que le patronat veut bien
lui refourguer. H. est un nom d’emprunt, mon ami doit en changer après
tout passage par un centre de rétention administrative (CRA). Comme
d’autres dans son cas à Toulouse, il se brûle régulièrement les phalanges
pour tromper les prises d’empreintes et éviter d’être expulsé. Il a été
arrêté il y a dix jours et a été interné pour la seconde fois au centre de
rétention administratif de Cornebarrieu, près de Toulouse.

Je suis allé le voir, ce mercredi 6 juillet dans l’après-midi avec deux
autres ami(e)s. Comme il l’avait demandé, nous lui avons apporté quelques
bouquins. Le Graal de fer, une terrible aventure de Merlin, et Feu au
centre de rétention, des sans-papiers témoignent, un recueil de récits de
migrants ayant participé aux luttes qui précédèrent l’incendie du CRA de
Vincennes en juin 2008 (1).

C’est vrai que, en le prenant dans la bibliothèque, on s’était bien
demandés si les flics de la police de l’air et des frontières (PAF)
n’allaient pas nous faire des ennuis.

Sur la route, dans la voiture, on discutait du statut de ce type
d’établissement. «Une zone d’exception», a dit l’un, un «camp», a dit
l’autre, une «prison pour étrangers», a dit la dernière. Les CRA
n’apparaissent pas sur la plupart des cartes, celui-là n’est pas indiqué
une seule fois sur la route alambiquée qui y mène. Il nous semble évident
que cet éloignement du monde normal a été pensé. Il est quasiment
impossible d’y venir en transports en commun. Le CRA a été construit en
bout de piste de l’aéroport Blagnac, «pour maximiser les temps de trajet
des fourgons cellulaires», explique la directrice de cabinet du préfet
(2). Il est conçu pour accueillir plus de 126 personnes, dont des familles
avec enfants. Même pour le bâtir, l’Etat s’est aménagé un espace
d’exception à l’intérieur du droit. Edifié en zone non constructible,
classé en catégorie «gêne forte» du plan d’exposition au bruit (3), le
préfet avait contourné l’interdiction en classant d’abord le camp en
équipement hôtelier puis en en équipement aéroportuaire. Des dommages
sonores interdits à l’encontre d’un corps légal sont devenus légitimes
parce qu’ils étaient appliqués sur des corps sans papiers.

Construit en 2006, ce CRA était un prototype d’un nouveau genre,
ultrasécuritaire, rationalisé, rentable et exportable. Il est doté d’un
fonctionnaire pour un retenu, de 103 caméras et de badges électroniques
pour accéder aux différentes zones (4).

Nous sonnons, une caméra nous interroge, semble réfléchir, puis nous ouvre
la grande grille automatique. On s’attend presque à voir Jabba le Hutt
[personnage de fiction de l’univers de «Star Wars», ndlr]. A l’entrée, un
policier de la PAF vérifie nos identités, nous fouille et nous passe au
détecteur de métaux. Puis il inspecte les livres. Il bloque vaguement sur
Feu au centre de rétention, vérifie qu’il n’y a rien de caché dedans puis
nous amène jusqu’au parloir où il nous enferme avec H. pour trente
minutes. Au bout d’un quart d’heure, une policière ouvre la porte et nous
demande le livre, expliquant qu’elle doit vérifier s’il est bien conforme
et ne risque pas d'«inciter à l’émeute».

J’explique qu’il s’agit de récits, que les sans-papiers de Vincennes n’ont
pas eu besoin de ce livre pour se révolter, je demande si elle a peur des
idées et, c’est vrai, de manière insolente, cynique et subversive,
m’exclame : «Mais on est en démocratie non ? ma bonne dame !»«Oui, on est
en démocratie, c’est justement pour ça que je dois contrôler !», nous
répond la fonctionnaire. C’est bien plus clair qu’un livre de Michel
Foucault ou de Giorgio Agamben, c’est technique et efficace, clair et
concis ; matérialiste et sans langue de bois.

Nous profitons de notre second quart d’heure avec H. pour discuter. Il
nous dit que, là aussi, il y a quelques mois, des Tunisiens ont fait
exploser les lumières et mis le feu. Que les policiers blancs travaillent
principalement à l’accueil et qu’à l’intérieur, ce sont des Noirs et les
Arabes qui sont chargés de l’encadrement. Que s’il n’est pas expulsé, il
ira en Angleterre ou en Belgique parce qu’en France, à la 3e fois, c’est
la prison. Puis la policière ouvre la porte et nous demande de partir. H.
lui demande le livre, il insiste pour l’avoir et hausse un peu le ton. Un
flic s’interpose, le repousse et l’enferme. La policière reprend la
parole. Le ton monte des deux côtés, puis un autre spectacle commence.

La jeune policière confisque le livre car le commandant l’a jugé «de
nature à inciter à l’émeute». J’explique qu’il y a un numéro ISBN, que la
censure d’Etat ne l’avait jusque-là pas interdit. En l’énonçant, je prends
conscience que l’Etat aménage l’espace et le temps en autorisant ou en
interdisant certains de nos gestes. En plein centre-ville, on peut acheter
ce livre, dans un centre de rétention on ne peut pas le donner. H. n’est
d’ailleurs par inculpé pour un délit, il est «retenu» parce qu’on lui
refuse des papiers, le droit de vivre librement en France et d’y
travailler pour la même paye qu’un Français. Là, il n’a pas le droit de
recevoir ce livre. Il lui est interdit de lire les témoignages d’autres
sans-papiers. Les agents de l’Etat cherchent à prévenir les révoltes en
empêchant la libre information mais aussi en interdisant certains gestes.
Donner ce livre trahit une rencontre et de la communication entre des
dominés, des prémices d’organisation que les dominants ne peuvent
supporter. Ils valident ainsi l’idée que les révoltes ne sont pas des
formes de résistance à l’oppression mais bien plutôt des émotions
collectives de foules manipulées depuis l’extérieur. «Incitation à
l’émeute», ça impose l’idée que le révolté est manipulé et manipulable,
qu’il évolue béatement entre la bêtise et la bestialité. Le fait
d’interdire ce livre à mon ami révèle comment l’Etat fonde sa loi sur des
programmes d’exception qu’il applique aux sans droits. L’Etat moderne se
découvre à l’entrée du camp. L’humanisme dont il parle si fort lui permet
avant tout de déshumaniser en silence.

«Vous incitez à la haine !» nous hurlent les deux agents de la PAF. L’un
de nous rit, l’autre gueule, la troisième s’indigne pathétiquement :
«Quoi, c’est nous qui incitons à la haine ?» «Oui, et ce livre dégrade la
fonction publique !», assure un autre uniforme. Sur ce, la policière
énonce l’argument imparable :«Et si on venait chez vous et qu’on vous
apportait un livre intitulé "Feu à M.R.", vous seriez content ?» Nous
éclatons d’abord de rire puis perdons notre temps en considérations
révoltées. Nous nous faisons chaudement raccompagner jusqu’à la sortie,
puis un dernier fonctionnaire, parmi ceux qu’avait attirés la scène, se
lâche sur mon pote : «C’est les communistes comme toi qu’il faut purger !»
Né à la fin de la guerre froide, je n’ai encore jamais entendu ces mots-là
prononcés par un être vivant et je découvre par la même occasion que mon
ami est communiste. Ce coquin de rouge me l’a bien caché !

Le camp n’est pas un lieu, pas un moment, c’est l’une des expressions les
plus contemporaines de ce qu’Hannah Arendt appelait «la banalité du mal».
Là où le droit bourgeois se démasque, où l’Etat est nu et assume
pleinement son rôle de gardien, là où la démocratie se dévoile comme
machine de guerre sociale.

Editions Libertalia, 2008. Les bénéfices de ce livre sont entièrement
reversés en soutien aux inculpés de l’incendie du CRA de Vincennes.

Anne-Gaëlle Baudouin-Clerc, directrice de cabinet du préfet, Ibid.

«La Dépêche», 13 novembre 2009.

Rapport de visite du contrôleur général des lieux de privation de liberté,
CRA Cornebarrieu, 17-20 mars 2009.


http://www.liberation.fr/societe/01012348888-qu-a-t-on-le-droit-de-lire-dans-un-centre-de-retention
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15 juillet 2011 5 15 /07 /juillet /2011 16:55

Reçu d'Avaaz ce jour

La mise sur écoute des téléphones d'enfants assassinés, les pots-de-vin à la police, la destruction de preuves de crimes, des menaces adressées aux responsables politiques -- pour toutes ces raisons les dirigeants britanniques affirment que l'empire de Rupert Murdoch a "fait son entrée dans la pègre". Pendant des décennies, Murdoch a régné en toute impunité, faisant et défaisant des gouvernements grâce à ses grands groupes médias et terrorisant ses adversaires pour qu'ils gardent le silence. Mais nous ripostons, et nous gagnons!

Grâce à près d'1 million d'actions, 7 campagnes, 30000 appels téléphoniques, des enquêtes et d'innombrables actions publiques et tactiques juridiques, nous avons joué un rôle moteur et avons empêché Murdoch d'acheter plus de 50% des médias commerciaux britanniques! A présent, nous étendons au monde entier notre toute dernière campagne menée au Royaume-Uni, afin de faire reculer partout la menace Murdoch.

Voici notre plan d'action: ensemble, nous pouvons a) engager des enquêteurs pour dévoiler les manœuvres de corruption de Murdoch au-delà du Royaume-Uni, b) coordonner les voix de personnalités de premier plan pour briser le cercle de la peur en s'exprimant sur cette question et c) mobiliser les citoyens dans des pays clés autour de nouvelles lois et mesures juridiques permettant de stopper Murdoch et de faire le ménage dans nos médias pour de bon.

Les membres d'Avaaz vivent dans tous les pays où Murdoch est actif, faisant ainsi de notre mouvement le seul capable de véritablement mener une campagne contre son empire planétaire et de la gagner. Le moment est venu: si seuls 20 000 d'entre nous donnent chacun une petite somme, nous pouvons saisir cette opportunité unique. Cliquez ci-dessous pour faire un don:

https://secure.avaaz.org/fr/stop_rupert_murdoch_donate/?vl

Pendant des semaines, des révélations quasi-quotidiennes ont mis à jour l'étendue de la corruption des médias de Murdoch au Royaume-Uni. Ses employés ont mis sur écoute les téléphones de milliers de personnes, dont des veuves en deuil et des soldats morts en Irak, ont subtilisé les informations bancaires d'un Premier Ministre et l'ont harcelé pendant 10 ans, ont versé d'énormes sommes à des officiers de police. Le fils de Rupert, James Murdoch, a lui-même autorisé des pots-de-vins pour des victimes.

Mais c'est la partie visible de l'iceberg -- Murdoch est un problème mondial. Il est connu pour imposer les lignes éditoriales à ses journaux. Il corrompt et contrôle les démocraties en poussant les responsables politiques à soutenir ses idées extrémistes sur la guerre, la torture, et sur une foule d'autres maux planétaires, et en détruisant les carrières d'élus à grand renfort de campagnes de diffamation à moins qu'ils ne fassent ce qu'il leur dit de faire. Aux Etats-Unis, il a contribué à l'élection de George W. Bush et emploie de fait la plupart des candidats aux primaires républicaines (voir les sources ci-dessous). Sa chaîne télévisée Fox News a répandu des mensonges pour promouvoir la guerre en Irak, a encouragé la rancœur envers les musulmans et les immigrés et a fait émerger le parti de droite baptisé "tea party". Peut-être pire que tout, il a contribué à faire obstacle à une action planétaire nécessaire pour enrayer le changement climatique.

Le règne de la diffamation et de la peur entretenues par Murdoch se désagrège, et de nombreuses personnes sont prêtes à dénoncer ses manœuvres. Le barrage est sur le point de céder aux États-Unis, en Australie et ailleurs, mais nous devons donner un coup d'accélérateur en enquêtant davantage sur Murdoch, en organisant une opposition de haut niveau contre ses méfaits, en veillant à ce que nos dirigeants politiques votent les lois qui feront le ménage dans nos médias pour de bon. Rendons cela possible:

https://secure.avaaz.org/fr/stop_rupert_murdoch_donate/?vl

Notre communauté n'a eu de cesse de mener campagne sur cette question quand presque tout le monde au Royaume-Uni avait abandonné tout espoir. Parce que notre mouvement prend sa force dans l'action citoyenne, nous ne craignons pas Murdoch comme la plupart des autres le font. C'est cette particularité que le pouvoir citoyen apporte au monde pour le faire changer. Aujourd'hui, l'espoir revient avec force au Royaume-Uni -- étendons-le au monde entier.

Avec détermination,

Ricken, Emma, Maria Paz, Giulia, Luis, Alice, Brianna et toute l'équipe d'Avaaz

SOURCES :

Rupert Murdoch, un magnat sous pression, Le Nouvel Observateur:
http://tempsreel.nouvelobs.com/actualite/monde/20110714.OBS7066/rupert-murdoch-un-magnat-sous-pression.html

Gordon Brown accuse Murdoch de méthodes criminelles, Le Figaro:
http://www.lefigaro.fr/international/2011/07/12/01003-20110712ARTFIG00529-les-deputes-britanniques-veulent-auditionner-murdoch.php

Scandale des écoutes: Murdoch capitule, AFP/Charente Libre:
http://www.charentelibre.fr/2011/07/14/scandale-des-ecoutes-murdoch-capitule,1045743.php

Murdoch renonce à BSkyB mais l'enquête demeure, Euronews:
http://fr.euronews.net/2011/07/14/murdoch-renonce-a-bskyb-mais-l-enquete-demeure/

Des internautes britanniques appellent au boycott des médias détenus par Rupert Murdoch, France 24:
http://www.france24.com/fr/20110713-2011-07-13-0122-wb-fr-le-net

Il est temps d'agir contre Rupert Murdoch, Courrier international:
http://www.courrierinternational.com/article/2011/07/13/il-est-temps-d-agir-contre-rupert-murdoch

Comprendre le scandale News of the World, L'Express:
http://www.lexpress.fr/actualite/monde/europe/comprendre-le-scandale-news-of-the-world_1011584.html

Fox News a mis son poids au service des républicains, La Tribune:
http://www.latribune.fr/journal/edition-du-0211/l-evenement/1064902/fox-news-a-mis-son-poids-au-service-des-republicains.html

"Nous aimons notre Fox News", Le Temps:
http://www.letemps.ch/Page/Uuid/764a690e-e6c8-11df-b91b-a75d996b69fb/Nous_aimons_notre_Fox_News

Le scandale qui déstabilise l'empire Murdoch, Le Monde:
http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/07/07/le-scandale-qui-destabilise-l-empire-murdoch_1545896_3232.html



Pendant des décennies, Murdoch a régné en toute impunité, faisant et défaisant des gouvernements en mobilisant son immense empire médiatique. Mais nous ripostons, et nous gagnons ! Nous avons joué un rôle clé pour stopper la tentative de Murdoch de prendre le contrôle des médias au Royaume-Uni. A présent, nous étendons au monde entier notre toute dernière campagne menée au Royaume-Uni, afin de faire reculer partout la menace Murdoch à l'aide de campagnes, d'enquêtes et d'actions en justice. Cliquez ici pour faire un don:

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15 juillet 2011 5 15 /07 /juillet /2011 11:57
12/07/2011 | 17H06 INROCKS
Crédits photo:  La prison marseillaise des Baumettes en 1999 (Reuters)

Dans une ordonnance de référé du 27 juin dont les Inrocks.com ont pris connaissance, le tribunal administratif de Marseille a alloué une provision de 2000 euros à un détenu handicapé dont les conditions de détention "n’assurent pas le respect de la dignité inhérente à la personne humaine".

Déambuler en fauteuil roulant dans la prison marseillaise des Baumettes? Pas facile. Tellement peu évident que cela en devient indigne. Voilà en substance, le message délivré par le tribunal administratif de Marseille dans une ordonnance de référé en date du 27 juin. Un détenu handicapé, excédé par ses conditions de détention, a en effet décidé de porter le fer contre l’Etat.

« Mon client n’avait pas de lit médicalisé, les meubles de la cellule n’étaient pas adaptés, la circulation en fauteuil restait très difficile », détaille Etienne Noël, avocat rouennais spécialisé en droit pénitentiaire.

Les conditions de détention aux Baumettes ne sont déjà pas très reluisantes en général. Pour les détenus handicapés… la vie devient survie. « Tous les petits gestes de la vie quotidienne sont rendus délicats », indique l'avocat, membre de l’Observatoire international des prisons. Il intente alors une action en justice en référé sur le même modèle que celles qu’il a déjà initiées, avec succès, à Rouen.

Impossibilité de prendre une douche, difficulté pour sortir en promenade, circulation en fauteuil très compliquée… Dans une longue requête, le détenu rend compte de son calvaire. « Le ministère de la Justice avoue de lui même que les cellules des Baumettes ne sont pas adaptées aux prisonniers handicapées », explique, atterré, l’avocat. Direction le tribunal administratif. Et les magistrats ne sont pas tendres.

« M T. a été détenu dans des conditions n’assurant pas le respect de la dignité inhérente à la personne humaine. Les cellules dans lesquelles il a été détenu ne sont pas homologuées pour accueillir des détenus handicapés moteur. »

Et d’enfoncer le clou. Ils relèvent que le détenu séjournait dans une cellule avec « des toilettes non closes, sans système d’aération spécifique ». La préparation des repas se fait à quelques centimètres des toilettes. Les conditions d’hygiène les plus minimales ne sont pas respectées.

Pour tous ces motifs, en se basant sur l’article 3 de la Convention européennes des droits de l’homme, le tribunal accorde à M. T. une provision de 2000 euros. 

« Cela montre que l’accueil des prisonniers handicapés n’est pas toujours adapté », tranche Patrice Tripoteau, directeur du pôle action nationale de l’Association des paralysés de France. Il évoque une « double peine ». La sanction pénale et celle liée au handicap.

« Depuis 2010, ajoute-t-il, un arrêté impose que tous les lieux de détention accueillant plus de 120 détenus comportent des locaux adaptés à hauteur de 3% de la surface de l’établissement. »

Dans un avis de 2006, le comité consultatif national d’éthique (CCNE) s’était penché sur la question du handicap en prison. Résultat : 5000 prisonniers présentaient une invalidité, toutes pathologies confondues.

« L’administration pénitentiaire doit simplement respecter ses obligations légales en matière de handicap », conclut le représentant de l’APF.

Pour le requérant marseillais, le combat n’est pas fini. « Nous allons maintenant introduire un recours sur le fond et la somme accordée devrait encore augmenter », indique son avocat. Aujourd’hui M. T. est toujours incarcéré aux Baumettes.

Le ministère de la Justice, de son côté, ne se prononce pas sur la décision du tribunal de Marseille. Il rappelle cependant que, « depuis 1990, chaque nouvelle prison construite est dotée d’une ou plusieurs cellules adaptées ». Pour celles qui ont été construites antérieurement, « les travaux se font au fur et à mesure ».

La décision marseillaise intervient dans un contexte plus que délicat pour l’administration pénitentiaire. Déjà en 2009, le tribunal administratif d’Amiens avait rendu une décision similaire pour un prisonnier handicapé incarcéré dans la maison d’arrêt de la ville. Actuellement, c’est la prison de Fresnes à Paris qui est visée par une procédure du même type. Cette fois-ci, ils sont plusieurs détenus handicapés à avoir saisi la justice.

Au-delà des personnes à mobilité réduite, de nombreux recours pour des détenus valides ont été introduits. A la maison d’arrêt de Rouen, en quelques mois, cent détenus ont obtenu 134 000 euros de dommages et intérêts pour des conditions de détention dégradantes.

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8 juillet 2011 5 08 /07 /juillet /2011 23:04

Un commando anti-prison pour mineurs frappe à Toulouse

Des bouteilles vidées sur les ordinateurs, « Nique la justice » barbouillé sur les murs… « Ça ressemblait à une action commando. Cela s’est passé très rapidement », nous raconte un témoin.

Les locaux de la direction inter-régionale de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) de Labège dans la banlieue toulousaine ont subi mardi 5 juillet en fin de matinée l’assaut d’une douzaine de personnes cagoulées et armées de bombes de gaz lacrymogène.

« Violence contre la violence de l’emprisonnement des mineurs dans les établissements spécialisés comme l’EPM de Lavaur dans le Tarn ? » s’interroge un éducateur auprès de LibéToulouse. Ou plus simplement « réaction au durcissement de la lutte contre la délinquance des mineurs », réfléchit le procureur de la République à Toulouse.

« Nos collègues sur place sont sous le choc. Nous avons du mal à comprendre que l’on puisse s’attaquer à une structure œuvrant pour la réinsertion de mineurs », raconte l’un des responsables CGT de la PJJ qui s’est rendu à Labége dans la journée.

Un tract a été laissé sur place par la bande, dont les enquêteurs de la police n’ont toujours pas livré le contenu. Selon la CGT, ce tract pourrait ressembler à celui qu’un « collectif anti-EPM distribue aux familles à l’occasion des parloirs de Lavaur ».

L’Établissement pénitentiaire pour mineurs de Lavaur a été secoué par une série d’incidents, en proie au mois de mai, selon les syndicats, à une « quasi-rébellion ».

Les éducateurs et surveillants tarnais, comme ceux de Marseille, se sont mis en grève à la mi-juin au motif que leur hiérarchie continuait à ignorer la plupart de leurs revendications sur la pénibilité de leur travail (Voir LibeToulouse au 13/05/2011).

Leur presse (LibéToulouse), 6 juillet 2011.

 

Labège : Un commando saccage le centre de la protection judiciaire de la jeunesse

Un commando d’une dizaine de personnes encagoulées a fait irruption, hier, vers 11h15, à Labège (Haute-Garonne), dans les locaux de la Direction interrégionale Sud de la protection judiciaire de la jeunesse. Une fois dans les lieux, ces personnes, visiblement bien organisées, se sont dispersées pour se ruer dans les couloirs et dans les différents bureaux « armées » de bouteilles dont elles ont déversé le contenu sur les bureaux et les ordinateurs. Un liquide marron au relent d’ammoniaque et qui pourrait contenir de l’urine et des excréments humains.

Aspergé de lacrymogène

Les membres du commando se sont également emparés de plusieurs extincteurs qu’ils ont, là encore, déversés sur les bureaux. Un employé qui tentait de s’interposer a été copieusement arrosé de gaz lacrymogène. Certains ont aussi rédigé sur des murs : « Nique la justice » et « Porcs ». Cinq minutes après être entré, le commando est ressorti en courant non sans avoir lancé plusieurs dizaines de tracts qui contiendraient des propos injurieux sur l’action éducative menée par la protection judiciaire de la jeunesse. Des écrits que les gendarmes ont saisis dans l’espoir d’identifier leurs auteurs et l’ordinateur avec lequel ils ont été rédigés. La section de recherches de Toulouse, en charge de l’enquête, a également fait procéder à des relevés de traces et d’indices sur les tags et dans les différents lieux où a sévi le commando.

http://pix.toile-libre.org/upload/original/1309979537.jpg

Michel Valet, le procureur de la République de Haute-Garonne, fait savoir que « tout laisse à penser qu’il s’agit de l’action de gens qui veulent manifester leur opposition aux réponses apportées en matière de lutte contre la délinquance des mineurs ». Un durcissement de ces réponses, souhaité par le gouvernement, est actuellement en cours d’élaboration. Michel Valet indique également que « les agents de la PJJ n’ont pas fait l’objet de violence physique même si cet acte, qui n’a finalement fait que peu de dégâts, les a profondément choqués ».

Cette affaire survient quelques semaines après celle d’Orvault, en Loire-Atlantique, où un mineur délinquant placé dans l’établissement pénitentiaire pour mineurs de cette ville s’était suicidé. Des gens avaient alors écrit sur les murs de la PJJ de Nantes : « L’EPM tue ».

Leur presse (Guillaume Atchouel, La Dépêche), 6 juillet 2011.

 

Un commando saccage les locaux de la Protection judiciaire de la jeunesse près de Toulouse

Un groupe d’une douzaine d’hommes encagoulés a saccagé mardi trois locaux de la Protection judiciaire de la jeunesse à Labège (Haute-Garonne), dans l’agglomération toulousaine, et aspergé les bureaux de lisier et de gaz lacrymogène. Un agent qui s’est interposé a reçu une projection de ce gaz, a précisé le procureur de la République de Toulouse, Michel Valet.

Ce groupe d’une dizaine de personnes a fait irruption vers 11h15-11h30 dans les locaux de la Direction interrégionale région Sud de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), de la direction territoriale de la Protection judiciaire de la jeunesse Haute-Garonne, Ariège et Hautes-Pyrénées, ainsi que du pôle territorial de formation.

« Ils ont débarqué en même temps sur les trois sites et ont saccagé les locaux avec des bouteilles de lisier, en aspergeant les bureaux de leur contenu. Cela sentait très fort l’ammoniaque. Ils ont également envoyé du gaz lacrymogène. Ils ont aussi tagué les murs avec des messages très durs comme “nique la paix” ou “nique la justice” qui visaient directement aux établissements pour mineurs », a déclaré à l’Associated Press un salarié témoin ayant requis l’anonymat.

Ces inscriptions ainsi que des tracts laissent penser « qu’ils étaient contre la politique menée à l’égard des mineurs », a confirmé le représentant du parquet. « Il y a certaines allusions dans le tract à l’établissement pour mineurs de Lavaur mais il est encore trop tôt pour établir un lien », a ajouté M.Valet.

Les établissements pénitentiaires pour mineurs (EPM) sont des lieux de détention réservés aux jeunes de 13 à 18 ans, condamnés ou prévenus. Ouverts progressivement depuis juin 2007, les EPM sont au nombre de six en France. Leur fonctionnement suscite depuis plusieurs mois un mouvement de protestation chez les surveillants de la PJJ qui réclament une reconnaissance de la pénibilité de leur travail et une remise à plat du projet EPM pour sécuriser les personnels dans leur mission. L’EPM de Lavaur (Tarn) a ainsi connu plusieurs journées de grève entre avril et juin.

Leur presse (AP), 5 juillet 2011.

 

Toulouse : un commando contre l’incarcération des mineurs vandalise la PJJ

Un commando d’une dizaine de personnes masquées a vandalisé mardi la direction interrégionale de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), à Labège, en banlieue toulousaine, pour manifester contre l’incarcération des mineurs, a déclaré le procureur sur place.

L’intrusion, qui s’est déroulée vers 11h15 et n’a duré que cinq minutes, avait d’abord été dénoncée par le syndicat CGT de la PJJ dans un communiqué annonçant qu’il allait porter plainte contre les intrus.

Ceux-ci ont au passage aspergé de gaz lacrymogène un salarié qui voulait s’interposer et qui a dû être brièvement soigné à l’hôpital, a indiqué le procureur de la République Michel Valet, lors d’un point de presse improvisé.

Cette action a eu lieu alors que le Parlement s’apprête à adopter une refonte de l’ordonnance de 1945 sur la justice des mineurs, qui comprend notamment la création d’un tribunal correctionnel pour les récidivistes de plus de 16 ans, pour des délits passibles de plus de trois ans de prison.

Tandis que les gendarmes, assistés de la police scientifique, menaient déjà l’enquête pour identifier les membres du commando, tous les représentants de l’État — préfet, directeur national de la PJJ, procureur de la République — se succédaient mardi après-midi à Labège.

« C’est un lieu un peu sacré. Il est très important de réagir. Nous avons une volonté très forte de retrouver les auteurs de ce geste inacceptable », a déclaré M. Valet.

Selon les témoignages rapportés par le procureur, « une dizaine de personnes cagoulées, gantées, ont fait irruption par plusieurs entrées dans les locaux du pôle territorial de formation de la PJJ et de la direction interrégionale. Ils ont déversé un liquide à forte odeur ammoniaquée, renversé des meubles, usé de gaz lacrymogène. »

« Ils étaient très organisés, tous en noir, et n’ont pas dit un mot. Ils sont repartis aussi vite. C’étaient plutôt de jeunes majeurs que des adolescents », a rapporté Jean-Philippe Balocco, DRH de cette unité de 40 salariés, qui n’accueille aucun jeune.

Pour Patrick Autié, directeur de cet établissement, « cela fait penser à une action politique, pas aux mineurs dont on s’occupe ».

Sans donner de précisions sur les premiers éléments de l’enquête, M. Valet a indiqué que les assaillants avaient laissé des inscriptions et des tracts parfois injurieux « contre l’incarcération des mineurs ». Il s’est refusé à en donner le libellé, car ils sont saisis par la police scientifique.

Selon la porte-parole de la CGT, Emmanuelle Tarissan, on pouvait lire notamment « nique la justice,… porcs ». La CGT fait état d’inscriptions hostiles aux établissements pour mineurs (EPM), les rapprochant de tags récents sur les murs d’un de ces EPM à Orvault (Loire-Atlantique).

Le procureur, comme la syndicaliste, ont fait état du « traumatisme » du personnel.

Les EPM ont été secoués par une série d’incidents au cours des dernières semaines, notamment à Lavaur (Tarn), provoquant plusieurs mouvements de protestation des surveillants et des éducateurs, qui se plaignent de la pénibilité de leur travail.

Les EPM, ouverts en 2007-2008, ont une capacité de 60 détenus de 13 à 18 ans chacun. Censés œuvrer à la réinsertion de mineurs condamnés ou prévenus, ils se distinguent par le fort encadrement des détenus, entourés de dizaines de surveillants, d’agents de la PJJ et d’enseignants.

Leur presse (Agence Faut Payer), 5 juillet 2011.

 

Toulouse : intrusion d’une bande à la protection judiciaire de la jeunesse

Une bande d’une douzaine de personnes masquées a envahi mardi les locaux de la direction interrégionale de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), aspergeant un salarié de gaz lacrymogène, à Labège, en banlieue toulousaine, a-t-on appris de source syndicale.

La gendarmerie a confirmé avoir dépêché sur place des effectifs pour mener l’enquête.

Selon une porte-parole du syndicat CGT de la PJJ, « une douzaine de personnes cagoulées sont entrées mardi matin dans les locaux du pôle territorial de formation de la PJJ mais aussi de la direction interrégionale ».

La CGT a par ailleurs publié un communiqué faisant état de slogans et d’inscriptions hostiles aux établissements pour mineurs (EPM) de la part de cette bande.

Le syndicat « apporte son soutien aux personnels victimes de cette intrusion intolérable » et souligne qu’il déposera plainte.

Les EPM ont été secoués par une série d’incidents au cours des dernières semaines, notamment à Lavaur (Tarn), en proie au mois de mai à une quasi-rébellion, selon les syndicats, qui a provoqué un mouvement de protestation des surveillants et des éducateurs.

Les éducateurs de la prison pour mineurs de Lavaur (Tarn), puis de Marseille, se sont remis en grève à la mi-juin parce que leur hiérarchie continuait, selon eux, à ignorer la plupart de leurs revendications sur la pénibilité de leur travail.

Les EPM sont censés œuvrer à la réinsertion de mineurs condamnés ou prévenus. Ils se distinguent par le fort encadrement de la soixantaine de détenus (au maximum) par des dizaines de surveillants, d’agents de la PJJ et d’enseignants. Les jeunes sont supposés passer le moins de temps possible en détention et le plus de temps possible en cours ou en activité collective pour préparer leur retour à la société.

Dans les faits, les intervenants s’émeuvent du fonctionnement de ces établissements, en particulier du fait qu’on y réunisse des mineurs a priori réinsérables et d’autres jugés irrécupérables.

Leur presse (Agence Faut Payer), 5 juillet 2011.

 

Labège : Un commando saccage la protection judicaire par « acte politique » ?

Un commando d’une dizaine de personnes, aux visages masqués, a saccagé mardi matin trois locaux de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) de la Direction interrégionale Sud, situés à Labège (Haute-Garonne). Le groupe protestait contre l’incarcération des mineurs, selon le procureur sur place.

La justice pour mineurs a été prise pour cible mardi matin en banlieue de Toulouse. Une groupe d’une dizaine de personnes a fait irruption dans trois locaux du site de la PJJ, situés à Labège, vers 11h15. L’intrusion n’aurait duré que cinq minutes. Mais, une fois dans les lieux, la dizaine de personnes se serait dispersée pour se ruer dans les couloirs et dans les différents bureaux. Selon La Dépêche, elles étaient « armées » de bouteilles « dont elles ont déversé le contenu sur les bureaux et les ordinateurs. Un liquide marron au relent d’ammoniaque et qui pourrait contenir de l’urine et des excréments humains. »

Dans leur action, les intrus ont au passage aspergé de gaz lacrymogène un salarié qui voulait s’interposer et qui a dû être brièvement soigné à l’hôpital, a indiqué le procureur de la République Michel Valet, lors d’un point de presse improvisé sur place. « Ils étaient très organisés, tous en noir, et n’ont pas dit un mot. Ils sont repartis aussi vite. C’étaient plutôt de jeunes majeurs que des adolescents », a de son côté rapporté Jean-Philippe Balocco, DRH de cette unité de 40 salariés, qui n’accueille aucun jeune.

http://pix.toile-libre.org/upload/original/1309987005.jpg

Refonte de la justice des mineurs au Parlement

Pour Patrick Autié, directeur de cet établissement, « cela fait penser à une action politique, pas aux mineurs dont on s’occupe ». Cette action coïncide, en effet, avec la refonte de l’ordonnance de 1945 sur la justice des mineurs que le Parlement s’apprête à adopter. En février, Nicolas Sarkozy en demandait des mesures « avant l’été » alors que des travaux avaient été engagés depuis de nombreux mois en vue de la rédaction d’un code pénal de la justice des mineurs. Cette refonte comprend notamment la création d’un tribunal correctionnel pour les récidivistes de plus de 16 ans, pour des délits passibles de plus de trois ans de prison.

Ces dernières semaines, les EPM ont été secoués par une série d’incidents, notamment à Lavaur (Tarn), provoquant plusieurs mouvements de protestation des surveillants et des éducateurs, qui se plaignent de la pénibilité de leur travail.
 Les EPM ont ouvert en 2007-2008. Ils sont sensés œuvrer à la réinsertion de mineurs (de 13 à 18 ans), condamnés ou prévenus. Les EPM ont une capacité de 60 détenus et se distinguent par leur fort encadrement avec des dizaines de surveillants, des agents de la PJJ et des enseignants.

Leur presse (France Soir), 6 juillet 2011.

 

Un commando armé et cagoulé a attaqué la PJJ de Labège

Mardi matin, une bande armée et cagoulée composée d’une dizaine de membres a attaqué le Pôle Territorial de Formation de la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ). Pour protester contre la politique d’incarcération des mineurs. Les faits se sont déroulés  à Labège à côte de la direction départementale et inter-régionale. L’un des personnels de la Direction Interrégionale qui se serait interposé aurait été hospitalisé indique le syndicat CGT de la PJJ.

Des slogans anti-EPM ont été inscrits sur les murs de ce lieu de formation. Une action commando qui intervient dans un contexte tendu. De réforme de la Justice des mineurs. À Orvault (44) des faits graves avaient étésignalés. Et récemment le centre pénitentiaire pour mineurs de Lavaur dans le Tarn avait connu plusieurs actes de rebellion.

Pour le syndicat CGT, il s’agit là d’une « intrusion intolérable ». La CGT, déposera plainte.

Le Procureur de la République de Toulouse, le Préfet et le directeur nationale de la PJJ se sont rendus sur les lieux. Selon la presse, l’enquête a été confiée à la gendarmerie.

Leur presse (Christophe Cavailles, Toulouse7.com), 6 juillet 2011.

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13 avril 2011 3 13 /04 /avril /2011 22:25

A l'initiative de Radio Citron, une cyber-action a été montée afin d'envoyer une lettre de refus en un clic eux députés et sénateurs.

http://www.cyberacteurs.org/cyberactions/presentation.php?id=268

Cyber action mise en ligne le 14/03/2011
Elle sera envoyée à : députés et sénateurs et à votre député ainsi qu'à vos sénateurs

Elle prendra fin le : 15/05/2011



Un projet de loi de réforme de la psychiatrie est présenté au Parlement à partir du 15 mars 2011, après un simulacre de concertation, discrètement et dans l'urgence. Or cette réforme est complètement centrée sur l'enfermement et la médication sous menace, le tout sécuritaire et autoritaire, portant atteinte aux libertés fondamentales et aux avancées de la psychiatrie des soixante dernières années.

Ne les laissons pas faire, opposons-nous à cette réforme et à ses conséquences désastreuses !

[ 2 903 participations ]

explicatif
Les patients en psychiatrie sont des citoyens qui souffrent, non des délinquants qui doivent être contrôlés et contraints jusque dans leur plus stricte intimité. Or cette loi leur propose d'aller mal à vie : la piqûre ou l'enfermement, dans des hôpitaux-prisons et dans une image de fou dangereux.

"Comment ai-je pu croire que ma personne était en droit d'être considérée avec la dignité inhérente à tout un chacun ? Ma liberté est foulée aux pieds. Je suis quoi ? Puisque je ne suis pas qui ? (...)
Peut-être, je vous le concède, mon esprit "boiteux" ne détient pas le pourquoi de votre folie à vouloir vous prémunir d'un danger fantasmé par les bons soins d'une société craintive. Vous pourriez m'emprisonner, vous pourriez me faire perdre mes capacités mentales, vous pourriez m'empêcher de penser, par extension à être, m'ôter toute dignité humaine. Comment ça vous pourriez, vous le faites déjà !
Si je ne suis rien à vos yeux pourquoi avez-vous donc tant peur de moi ?"
Z., atteint de troubles psychiques, à propos de la présente réforme de la psychiatrie.


Historique et explicatif :

Novembre 2008, mort à Grenoble d'un étudiant poignardé par un homme hospitalisé en psychiatrie et qui est sorti de l'hôpital sans autorisation.

Nicolas Sarkozy, président de la République, fait un discours à l'hôpital psychiatrique d'Antony, le 2 décembre 2008, quinze jours après ce meurtre : "Les malades mentaux sont potentiellement dangereux, voire criminels".

Déjà, depuis son arrivée au ministère de l'Intérieur en 2002, Nicolas Sarkozy n'a eu de cesse de mettre en oeuvre son obsession : assimiler les malades mentaux à des délinquants. En février 2007, sous la pression de la mobilisation des professionnels, des associations de familles et d'usagers de la psychiatrie, il a retiré cette disposition de sa loi de Prévention de la Délinquance. En promettant qu'il y reviendrait...

Dès ce discours d'Anthony, le grand renfermement a commencé. Augmentation des chambres d'isolement, construction de murs, élévation des grillages, installation de caméras dans les hôpitaux et même dans certains services ! Un budget de 70 millions d'euros a été immédiatement débloqué uniquement pour ces équipements sécuritaires. Ce budget ne doit absolument pas être utilisé pour améliorer les moyens pour les personnels soignants, ni pour les conditions d'accueil et de soins.

Pourtant, lors des Etats généraux de la psychiatrie en 2003, l'ensemble des syndicats de tous les personnels réunis pour la première fois en France a demandé au gouvernement 22 mesures d'urgence : aucune n'a été appliquée.

Arrive maintenant cette réforme effarante, proposée par Roselyne Bachelot, ministre de la santé, à consulter sur :
http://www.assemblee-nationale.fr/13/projets/pl2494.asp  
Les 7 premières pages sont "l'exposé des motifs", puis suivent les modifications elles-mêmes de la loi existante.

Vous pouvez lire les articles expliquant ses implications et conséquences, sur http://www.collectifpsychiatrie.fr  
et signer la pétition urgente, qui a déjà recueilli plus de 20.000 signatures.

Vous pouvez également voir une vidéo sur le site advocacy.fr, "Appel contre les soins sécuritaires", où s'expriment la Ligue des Droits de l'Homme et le Syndicat de la Magistrature, notamment (19 min).

Vous trouverez les observations du Syndicat de la Magistrature sur la réforme sur : http://www.syndicat-magistrature.org/IMG/pdf/obsloipsychiatrie_2.pdf  

"L'esprit de cette réforme, c'est de nous marquer, de nous parquer, de nous droguer, et quoi ensuite ?" C., patiente.

Selon le texte de cette réforme, il sera possible, au nom de la loi, de contraindre une personne atteinte de troubles psychiques à se soigner, y compris en "ambulatoire" (hors de l'enceinte de l'hôpital). Si le psychiatre soupçonne qu'il y a "risque de discontinuité" de prise des médicaments, la police peut venir chercher la personne à son domicile et l'enfermer pour 72 heures, sorte de garde à vue psychiatrique, et pour trois jours de plus, si le préfet prend le temps dont il dispose pour se prononcer sur la levée de la mesure. Et bien plus longtemps encore, si le patient refuse les médicaments imposés... puisque le préfet peut décider le maintien de l'enfermement s'il est "de notoriété publique" que la personne est "porteuse de troubles à l'ordre public"... De plus, cette contrainte pourra s'appliquer à n'importe quel trouble psychique, même si le patient est stabilisé ou guéri.

Jusqu'à présent, l'injonction de soins concernait la prévention de la récidive dans le cadre d'une surveillance judiciaire, par exemple pour les agresseurs sexuels, décidée par le juge d'application des peines, comme pour les bracelets électroniques. Il s'agissait de mesures exceptionnelles. Par cette réforme, ces pratiques vont maintenant se généraliser.

Et c'est toute la société qui bascule.

Avec cette réforme, le pacte républicain qui soutient la séparation des pouvoirs est rompu : les préfets discréditent les avis des psychiatres, décident contre leur avis l'enfermement, son prolongement et sa levée. Si l'hospitalisation protège le patient pour des soins, elle devient un enfermement arbitraire quand le préfet refuse la sortie demandée par le psychiatre.

Déjà, nous connaissons depuis quelques années une augmentation des hospitalisations d'office, pas parce que les patients seraient plus dangereux ou plus nombreux à être malades, mais parce que beaucoup de structures de proximité, intermédiaires, ont été fermées. Elles étaient des paliers, évitaient bien des aggravations. Celles qui restent manquent de moyens, de personnel, les attentes pour des rendez-vous sont dangereusement longues, souvent plusieurs mois ! Telle structure a vu en quelques mois son nombre d'hospitalisations d'office être multiplié par... 10 ! Par 10 ! Alors que les pathologies ou les comportements sont les mêmes. Que se passe-t-il ? Le préfet semble signer l'enfermement à tour de bras, mais hésiter à signer les levées, le psychiatre aussi, parce qu'ils ont peur d'être jugés trop laxistes... non pour le bien du patient, ni pour celui de la société ! Voici des conséquences déjà visibles de l'esprit de cette loi.

"Alors comment faire avec un nombre croissant de personnes hospitalisées d'office, ces placements figent les prises en charges, ça peut ressembler à "un jour sans fin". Je ne suis pas là pour surveiller le soin mais pour un accompagnement dans un contenant soignant, et en ce moment j'en ai gros sur la patate." R., infirmier en psychiatrie.

Toute hospitalisation d'office est toujours extrêmement violente pour le patient. Tous nos témoignages personnels sont terrifiants. Les patients en gardent un traumatisme à vie. L'hospitalisation doit de toute façon durer le moins possible et ne pas être systématique. Or ce n'est pas du tout le sens de cette loi.

Dans un autre ordre d'idée, savez-vous que, faute de moyens financiers suffisants, certains établissements psychiatriques, pour surveiller leurs patients, font appel à des sociétés privées de gardiennage avec des chiens ?

Aujourd'hui, les dispositions sécuritaires vont être inscrites dans la loi et vont transformer la psychiatrie en une police sanitaire spécialisée.

Quant à la stigmatisation, certains croient, ou font croire, que la folie libère le monstre meurtrier qui serait en nous, les "présumés coupables", mais c'est faux et injuste. C'est mettre au pilori les plus fragiles d'entre nous. Toutes les études menées démontrent que les malades psychiques ne sont pas plus dangereux que les autres. Or un tiers de la population française a des troubles psychiques ! Par contre, ces personnes malades ont 11,8 fois plus de risques d'être victimes de crimes violents que la population générale (Chiffres de la Commission "Violence et santé mentale"). Et 300 fois plus de risques de se faire agresser par des personnes non malades, que l'inverse. En fait, les patients sont beaucoup plus dangereux... pour eux-mêmes.

Ainsi, cette réforme enferme, dedans, dehors et dans les veines, des personnes qui ne sont pas plus dangereuses que les autres.

Prétendant améliorer "l'accès aux soins" et leur "continuité", ce projet propose uniquement un accès à la contrainte sans limite de durée, limitant les soins à une pure surveillance. Il s'agirait de "Surveiller, contrôler, injecter" alors que nous défendons une psychiatrie qui "accueille, écoute, soigne", dont le lien relationnel est l'essentiel, le tissage patient de la confiance garante de l'efficacité thérapeutique !

Car il est primordial de laisser au patient la possibilité d'adhérer librement au soin, ce qui lui permet d'être un je-sujet de son être, de sa vie, capable de penser sa maladie, la mettre en perspective, en comprendre la source de ce fait, la désamorcer en partie ou complètement, et éviter un éventuel passage à l'acte. Ces soins qui permettent le lien transitionnel avec les soignants, les soins humains, la parole, les entretiens, les activités sociales et créatives, ces soins efficaces ne sont pas soutenus par cette loi, au contraire elle les met en péril, contre toute raison. De plus, poser un jugement de dangerosité et d'"irrécupérabilité" sur un patient, c'est lui donner la sensation qu'il est traqué, par tous et partout, et cela favorise les passages à l'acte violents. Or les malades psychiques ont souvent subi une maltraitance dans leur jeunesse, source de pathologies. Car c'est par trop de souffrance que l'esprit cherche des solutions qui parfois génèrent des pathologies. Verrouiller encore plus l'hôpital psychiatrique, l'enfermement et la médication, considérer les patients comme dangereux, à vie, ne sont donc pas la solution à cette souffrance.

D'autre part, le soin sans consentement (sous contrainte) de chaque personne sera défini par un protocole stéréotypé établi par le Conseil d'Etat ! Cette disposition va à l'inverse de toute logique thérapeutique : chaque personne est singulière ; le soin doit être décidé entre le patient et le psychiatre, et évoluer selon l'état du patient, en fonction de chaque situation.

De plus, la suppression totale des sorties d'essai, préconisée par cette loi, est-elle utile au patient ? Elles permettent pourtant une meilleure préparation et moins de stress, moins d'échecs à la sortie de l'hôpital.

Pour ne pas être en reste, les patients ayant fait ne serait-ce qu'un séjour en Unité de Malades Difficiles ou ayant eu des démêlés avec la justice seront inscrits dans un fichier que le Préfet consultera pour décider des levées de soins sans consentement : un casier judiciaire psychiatrique à vie.

Rappelons qu'un patient en psychiatrie n'est pas un délinquant, mais un sujet de droit qui, pour un moment, peut avoir le discernement amoindri.

Cette réforme censée nous rassurer en présentant une sécurité va aboutir à l'inverse de ce pour quoi elle est prévue : la non-observance des soins et les hôpitaux engorgés. Elle est totalement contre-productive. Qui y gagne? Ni les malades, ni la société, ni la sécurité. Et comment va se comporter une population persuadée que tous les malades sont dangereux ou que tous les dangereux sont enfermés ?

Par ailleurs, le domaine des troubles psychiques s'étend, par exemple, au monde de l'entreprise, où les souffrances peuvent être terribles, ou à l'adolescence, aux conflits familiaux... Quand le consentement aux soins sera difficile à obtenir, ne sera-t-il pas facile, pour un médecin inquiet, de recourir à cette loi ?

D'autre part, il est imaginable que les enjeux financiers soient considérables pour les laboratoires pharmaceutiques grâce à cette réforme.

Aussi, nous vous proposons d'écrire aux députés et aux sénateurs pour leur signifier que des citoyens sont bien au courant de cette loi et qu'ils la refusent en bloc.

"Il n'y a point de plus cruelle tyrannie que celle que l'on exerce à l'ombre des lois et avec les couleurs de la justice..." Montesquieu

Merci !
Des membres du Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire et les patients et animateurs de Radio Citron

collectifpsychiatrie.fr et radiocitron.com

 

Cyber action mise en ligne le 14/03/2011
Elle sera envoyée à : députés et sénateurs et à votre député ainsi qu'à vos sénateurs

Elle prendra fin le : 15/05/2011




 

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6 avril 2011 3 06 /04 /avril /2011 19:46

 

 

COMMISSION NATIONALE CONSULTATIVE

DES DROITS DE L’HOMME

Avis sur le projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant

l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge

(Adopté en assemblée plénière le 31 mars 2011)

1. La CNCDH prend l’initiative de se prononcer dans cet avis sur le projet de loi relatif aux

droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités

de leur prise en charge (ci-après le projet de loi) tel qu’issu des travaux de la Commission des

Affaires sociales de l’Assemblée nationale. Celle-ci a apporté des modifications importantes à

un texte qui, déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 5 mai 2010, avait déjà subi, par

le biais d’une lettre rectificative enregistrée le 26 janvier 2011, des adaptations nécessitées par

une décision du Conseil constitutionnel. Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité,

ce dernier s’est en effet prononcé le 26 novembre 2010 sur l’exigence d’un contrôle

juridictionnel du maintien de l’hospitalisation psychiatrique sans consentement1 avant

l’expiration des quinze premiers jours.

2. La CNCDH s’est saisie de ce projet de loi pour les mêmes raisons qui l’avaient poussé, en

2008, à se prononcer sur la maladie mentale et les droits de l’homme2. Dans la mesure où le

traitement de malades qui ont perdu leur discernement peut impliquer, dans leur intérêt et dans

celui de leur entourage, l’hospitalisation sans consentement, une question de liberté est en jeu.

Outre la liberté d’aller et venir, pour ces malades comme pour tout malade, le droit à la sûreté

et l’inviolabilité du corps humain sont des composantes d’une liberté individuelle à laquelle

toutes les garanties doivent être apportées.

3. L’impact de la réforme actuelle, qui était déjà en germe lors des travaux de la CNCDH de

2008, va cependant bien au-delà du champ classique de l’internement. La décision prise sans

le consentement de l’intéressé consacre dorénavant l’entrée dans une phase d’obligation de

soins dont l’hospitalisation ne sera désormais qu’une des modalités possibles et qui pourra

recouvrir des soins ambulatoires sans consentement. La dérogation au droit de tout malade de

consentir aux soins dont il fait l’objet ouvre par conséquent un champ inédit dans la mesure où

la contrainte pourra être exercée entre les murs d’un établissement mais également hors les

murs, sans accroche territoriale, ce qui rend plus difficile tout contrôle de la nécessité ou de la

proportionnalité des mesures prises, ainsi que la sortie de cette situation d’exception.

4. Bien qu’une réforme en profondeur du régime de l’hospitalisation sans consentement, du fait

des mésusages dont il est l’objet et que la CNCDH avait pu constater dans ses travaux

antérieurs, soit un souhait largement partagé par les professionnels, les usagers et leurs

proches, le projet de loi est la cible de critiques très vives, qui dénoncent son caractère

sécuritaire. Déjà en 2008, la CNCDH avait déploré que la question de la maladie mentale ait

été évoquée, dans le débat public, à propos de textes qui ont alimenté l’amalgame et la

confusion avec la délinquance, la violence et la dangerosité. Ici encore l’ensemble du

problème de la prise en charge des personnes relevant de la psychiatrie est abordé à partir des

cas des malades ayant traversé un épisode critique de leur pathologie, lesquels sont

particulièrement visés par de nombreuses dispositions de ce projet de loi. Dans un contexte de

1 La décision du Conseil constitutionnel porte précisément sur l’hospitalisation à la demande d’un tiers.

2 Avis sur la maladie mentale et les droits de l’homme, adopté par l’assemblée plénière du 12 juin 2008.

2

très grande dégradation de la psychiatrie, notamment de secteur, un projet de loi centré sur

« certains patients susceptibles de présenter un danger pour autrui », selon la formule retenue

dans l’exposé des motifs, ne manque pas d’interroger.

5. Tant les conditions de prise en charge qui peuvent être imposées à un malade, dans un

parcours de soins psychiatriques inédit, que l’institution d’un contrôle systématique par le juge

du maintien en soins sans consentement, ont un impact considérable sur les droits des

malades. Ces questions traitées dans le projet de loi appellent un certain nombre de remarques

et soulèvent des questions que cet avis entend soumettre à la réflexion.

***

Les conditions actuelles de prise en charge d’un malade sans son consentement

6. Aujourd’hui, le code de la santé publique (ci-après CSP) fixe les modalités de l’hospitalisation

psychiatrique qui peut être libre ou intervenir sans le consentement de l’intéressé.

L’hospitalisation est prononcée à la demande d’un tiers lorsque les troubles rendent

impossibles le consentement et que l’état de la personne impose des soins immédiats assortis

d’une surveillance constante en milieu hospitalier (art. L.3212-1 du CSP). La demande est

alors accompagnée de deux certificats médicaux datant de moins de quinze jours, dont un au

moins ne doit pas avoir été établi par un médecin exerçant dans l’établissement qui va

accueillir le malade. A titre exceptionnel et en cas de péril imminent, le régime actuel prévoit

déjà que le directeur de l’établissement peut prononcer l’admission au vu d’un seul certificat

médical émanant éventuellement d’un médecin exerçant dans l’établissement d’accueil et

accompagné d’une demande formulée par un tiers.

7. Une hospitalisation à la demande d’un tiers prend fin dès qu’un psychiatre de l’établissement,

dans un certificat médical circonstancié, certifie qu’elle n’a plus lieu d’être. La levée de la

mesure peut également émaner du préfet ou intervenir sur demande du curateur, du conjoint,

des ascendants ou descendants majeurs, de la personne ayant signé la demande

d’hospitalisation ou d’une personne autorisée par le conseil de famille, enfin de la commission

départementale des hospitalisations psychiatriques. Le représentant de l’Etat peut s’opposer

provisoirement à la sortie et au besoin ordonner en lieu et place une hospitalisation d’office.

8. L’hospitalisation d’office quant à elle est prononcée, lorsque les troubles mentaux

compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public, par

arrêté du préfet de police à Paris et du représentant de l’Etat dans les départements, au vu d’un

certificat médical circonstancié ne pouvant émaner d’un médecin exerçant dans

l’établissement d’accueil (art. L.3213-1 du CSP). En cas de danger imminent pour la sûreté

des personnes, qui peut être attesté par la simple notoriété publique, le maire et, à Paris, les

commissaires de police, peuvent prononcer des mesures provisoires que le représentant de

l’Etat doit confirmer dans les vingt-quatre heures (art. L.3213-1 et suivants du CSP). La

CNCDH avait constaté dans ses travaux de 2008 que les mesures provisoires prononcées par

des maires était d’usage fréquent et répondait aux difficultés de trouver un tiers.

9. La mainlevée de l’hospitalisation d’office est acquise si le représentant de l’Etat n’en

renouvelle pas l’arrêté, dans les trois jours précédant l’expiration du premier mois

d’hospitalisation, puis des trois mois suivants, et ensuite de six mois en six mois. Le préfet

peut également mettre fin à cette hospitalisation à tout moment. La sortie des personnes dont

l’irresponsabilité pénale est due à un trouble mental est subordonnée aux décisions conformes

de deux psychiatres n’appartenant pas à l’établissement (art. L.3213-8 du CSP).

10. Le régime actuel prévoit des sorties d’essai, qui sont définies comme des aménagements des

conditions de traitement des personnes hospitalisées sans leur consentement. Ces sorties

3

comportent une surveillance médicale. Elles ne peuvent excéder une durée de trois mois mais

sont renouvelables et, dans les faits, se prolongent parfois pendant plusieurs années.

Les innovations introduites par le projet de loi

11. Le projet de loi introduit des modifications substantielles au régime actuel. L’hospitalisation

complète sans consentement devient l’une des phases ou modalités d’un parcours de soins

sans consentement impliquant des obligations ou contraintes qui peuvent s’exercer en

établissement, mais aussi hors des murs, au domicile ou dans d’autres lieux de vie, comme par

exemple dans une habitation protégée ou dans une maison de retraite. La prise en charge passe

obligatoirement par un séjour de soixante douze heures en établissement et sous forme d’une

hospitalisation complète, où sont définies les modalités de prise en charge. La responsabilité

de cette période d’examen incombe en tout état de cause à un directeur d’établissement, lequel

peut être privé. Cette mesure initiale est certes prise à des fins de diagnostic mais elle est bel et

bien une mesure de contrainte puisque les dispositions dérogatoires permettant une

hospitalisation sans consentement sont renforcées. Ainsi, les personnes aujourd’hui

hospitalisées à la demande d’un tiers pourront toujours être admises en soins psychiatriques

sans consentement à la demande d’un tiers mais aussi, en l’absence de celui-ci et en cas de

péril imminent, sur décision du directeur d’hôpital qui se prononcera au vu d’un seul certificat

médical émanant, le cas échéant, d’un médecin exerçant dans l’établissement (nouvelle

rédaction de l’article L.3212-3).

12. A l’issue de ces soixante douze heures, l’hospitalisation peut être prolongée ou faire place à un

autre protocole de soins. La gestion du suivi en établissement relève de celui-ci, sous réserve

de nouvelles conditions. En effet les sorties d’essai sont supprimées et les modifications du

statut du malade organisées. Elles aboutissent à un statut rigoureux, tout particulièrement pour

certains malades définis, semble-t-il, comme dangereux, en vertu de critères qui ne relèvent

pas d’une analyse individuelle de leur état. Il s’agit de ceux qui sont là par suite d’une décision

de justice déclarant leur irresponsabilité pénale, ou qui seraient à un moment donné passés par

une unité pour malades difficiles. Pour ceux là, il n’est possible de sortir ou de voir lever la

contrainte qu’après une procédure renforcée, le recours à des expertises multipliées ou à des

autorisations prolongeant d’autant la durée de l’internement. Pour les malades faisant l’objet

de soins à la demande d’un tiers ou en cas de péril imminent (nouvelle procédure en l’absence

de tiers demandeur), il importe de noter qu’à l’avenir, la levée des contraintes pourra survenir

sur demande du tiers mais que le directeur de l’établissement ne sera pas tenu d’y faire droit si

un péril imminent pour la santé du patient est établi (nouvelle rédaction de l’article L.3212-9

du CSP).

Interrogations sur le régime à venir

13. Ce nouveau régime est loin de faire l’unanimité chez les professionnels, les malades et leurs

proches. Leurs inquiétudes, de tous ordres s’agissant de procédures complexes, se focalisent

sur la crainte que la réforme renforce au-delà de l’indispensable la contrainte pesant sur les

malades. La CNCDH partage cette crainte. Elle avait en effet constaté le renforcement en

France du recours à l’hospitalisation, à la différence de pays comparables et en renonciation

progressive à une politique du secteur qui avait suscité de grands espoirs. Elle constate surtout

une inégalité incompréhensible pour de seules raisons médicales des pratiques sur le territoire.

14. Dans un contexte marqué par une insuffisance de moyens et des difficultés de recrutement des

spécialistes médicaux et infirmiers, une concurrence non résolue entre les dépenses exigées

pour les établissements et la médecine des secteurs, ce séjour obligatoire en établissement

favorise la formule de l’internement. En outre le système d’expertise sur lequel repose tout le

jeu des certificats et l’examen par un collège des différentes étapes est jugé par beaucoup

4

insuffisant en effectifs, en qualité et surtout inégalement réparti. La CNCDH craint qu’il ne

puisse, par manque d’autorité, dégager le sort des malades mentaux de l’amalgame qui

conduit à privilégier un point de vue sécuritaire, et, pour éviter tout risque, enfermer plutôt que

d’organiser les moyens d’un accompagnement.

15. A cela s’ajoute le fait que la loi reste bien floue sur la portée réelle, en termes de libertés

publiques, de cette importante innovation que constituent les soins sans consentement.

Qu’impliquent-ils en pratique pour le droit d’aller et venir, de protection du domicile, de

rapports avec les proches et dans d’autres lieux de vie, qu’en est-il du libre choix de son

médecin, des actes de la vie courante ? Les conséquences d’un refus de se prêter au traitement

sont-elles le retour ou l’envoi en établissement ? Il est difficile à la seule lecture du projet de

mesurer les véritables sujétions autres que médicales qui doivent être précisées et assorties de

garanties.

16. En conséquence, malgré les précisions apportées par le texte, la CNCDH a le sentiment que la

concertation permettant un véritable consensus dans ce domaine très sensible n’est pas allée

assez loin et que la concomitance des réformes et des moyens n’est pas réalisée. Le patient

sera plus isolé que jamais dans une société hostile et face à une réforme dont il constituera le

« cobaye ». Plus particulièrement, il ne paraît pas acceptable de retenir des critères comme le

passage devant la justice ou dans telle unité des établissements pour imposer à un malade,

parce qu’il a eu un épisode critique, un régime juridique plus sévère. Il a droit à ce que

l’appréciation de son cas se fasse sur la seule base des nécessités de son traitement et sous la

responsabilité de son médecin qui doit évidemment appréhender tous les problèmes liés à la

vie en société de son malade.

***

Les droits des patients

17. En contrepartie d’une réforme à l’évidente portée contraignante, le projet de loi est

parfaitement conscient de la nécessité de renforcer les droits des intéressés. Ceux-ci disposent

dans le régime actuel de voies d’information, de réclamation et de recours que le projet entend

faciliter. Dès à présent des commissions départementales des hospitalisations psychiatriques3

peuvent examiner les conditions d’hospitalisation, le juge administratif peut sur recours statuer

sur la régularité des différentes procédures d’admission, au besoin en référé, et à tout moment

l’autorité judiciaire, le juge de la liberté et de la détention, peut en tant que garant de la liberté

individuelle se prononcer sur le bien fondé de la mesure d’hospitalisation. Le Contrôleur

général des lieux de privation de liberté s’ajoute à la liste des autorités avec lesquelles le

malade peut communiquer (nouvelle rédaction du deuxième alinéa de l’article L. 3211-3 du

CSP).

18. La CNCDH prend acte des aménagements que le texte institue pour renforcer la motivation

des décisions, le droit d’être informé et les conseils dont l’intéressé peut s’entourer. Des

études qu’elle a menées, il ressort cependant qu’il est très difficile, s’agissant de ces malades,

d’assurer l’effectivité de ces droits. Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté

apporte sur ce point des données très éclairantes. Le simple fait que, pour des raisons

médicales ou de gestion, des malades soient mis à l’isolement ou coupés de contacts avec des

proches ou des tiers, ce qui est une éventualité courante, est en contradiction avec l’exercice

de tels droits. Or il n’est pas rare que ces pratiques d’isolement s’appliquent dans un

établissement sans considération de l’origine des malades et que même des malades venus

3 Elles deviennent dans le projet de loi des commissions départementales des soins psychiatriques et leur

intervention ne devient obligatoire que pour les personnes en soins sans consentement en cas de péril imminent

ou dont les soins se prolongent au-delà d’une durée d’un an, au lieu de trois mois actuellement. Ce resserrement

de leurs missions répond à des difficultés attestées de leur fonctionnement.

5

librement ou sur demande d’un tiers concerné y soient assujettis. Un malentendu de principe

existe puisqu’il s’agit d’être informé, de discuter et de faire tomber le cas échéant des mesures

dont la raison d’être est le traitement et que le malade n’est pas toujours à même d’apprécier

avec discernement. La CNCDH estime cependant que les procédures classiques destinées à

garantir les libertés publiques, et plus exactement la possibilité de faire appel à un conseil, ont

leur place dans ces situations de contrainte à portée médicale. La présence renforcée des

avocats dans les établissements peut être la condition nécessaire à l’exercice des droits.

Le contrôle du juge sur les décisions prises sans le consentement du malade

19. En matière de renforcement des droits des malades, l’introduction d’un contrôle judiciaire a

posteriori systématique des hospitalisations sans consentement est une disposition centrale du

projet de loi. La CNCDH, qui n’avait pas antérieurement penché pour la judiciarisation des

décisions en cause, reconnaît la valeur des arguments avancés pour renforcer en la matière le

rôle du juge judiciaire. Il est non seulement, en ce domaine comme ailleurs, garant de par la

Constitution de la liberté individuelle, mais son intervention offre en outre à l’intéressé les

avantages d’une procédure ouverte et d’un débat contradictoire ; elle se recommande

d’ailleurs de l’exemple de la plupart des pays européens ressemblant au nôtre. Bien que le

système antérieur n’ait pas été privé de garanties, il convient sans aucun doute – et le Conseil

constitutionnel ayant tranché – de franchir ce pas. Pour autant, certaines questions importantes

demeurent pendantes concernant la mise en oeuvre de ce nouveau statut et le champ de la

réforme.

20. Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel, dans sa

décision du 26 novembre 2010, s’est prononcé en faveur d’une judiciarisation du contrôle de

l’hospitalisation sous contrainte, considérant que « la liberté individuelle ne peut être tenue

pour sauvegardée que si le juge intervient dans le plus court délai possible ; […] en prévoyant

que l'hospitalisation sans consentement peut être maintenue au delà de quinze jours sans

intervention d'une juridiction de l'ordre judiciaire, les dispositions de l'article L. 337 [actuel

article L. 3212-7] méconnaissent les exigences de l'article 66 de la Constitution »4.

21. Afin de se conformer aux exigences constitutionnelles, le projet de loi prévoit un contrôle

systématique du juge des libertés et de la détention pour toute hospitalisation complète se

prolongeant au-delà de 15 jours, puis de nouveau, avant l’expiration d’un délai de 6 mois5. Ce

contrôle s’initie par une saisine par le directeur de l’établissement d’accueil ou le représentant

de l’État dans le département6. Le juge des libertés et de la détention statue après débat

contradictoire, au cours duquel la personne hospitalisée, assistée d’un avocat, est entendue7. Il

dispose à l’appui d’un avis médical conjoint émanant de deux psychiatres de l’établissement

d’accueil8. Le juge est habilité à ordonner le maintien en hospitalisation complète, sa

mainlevée ou encore sa substitution avec une prise en charge sous forme ambulatoire9.

4 Décision du Conseil constitutionnel n° 2010−71 – Question prioritaire de constitutionnalité, décision du 26

novembre 2010

5 Projet de loi du 5 mai 2010, modifié par lettre rectificative du 26 janvier 2011,

Article L. 3211-12-1. – I. du CSP « L’hospitalisation complète d’un patient sans son consentement ne peut se

poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention […] n’ait statué sur cette mesure […] avant

l’expiration d’un délai de quinze jours à compter de l’admission prononcée en application du chapitre II ou du

chapitre III du présent titre ou de l’article L. 3214-3 » […]

6 Article L. 3211-12-1 I du CSP.

7 Article L. 3211-12-2 du CSP.

8 Article L. 3211-12-1 II du CSP.

9 La discussion en séance publique à l’Assemblée nationale a retiré au juge le pouvoir d’ordonner une autre

forme de prise en charge que l’hospitalisation complète, pouvoir qui avait été introduit par la commission des

Affaires sociales au cours de ses travaux. Articles L. 3211-12-1 I et III du CSP.

6

22. Le Conseil constitutionnel s’est également prononcé sur l’opportunité d’un contrôle a priori

du juge judiciaire, considérant que « si l'article 66 de la Constitution exige que toute

privation de liberté soit placée sous le contrôle de l'autorité judiciaire, il n'impose pas que

cette dernière soit saisie préalablement à toute mesure de privation de liberté ».

Comparativement, dans d’autres domaines de privation de liberté où le juge constitutionnel a

été appelé à statuer, le « plus court délai possible » d’intervention du juge judiciaire sur le

fondement de l’article 66 de la Constitution s’est traduit en un délai de 48 heures ; ainsi en estil

par exemple en matière d’enfermement des étrangers en situation irrégulière, en rétention

aussi bien qu’en zone d’attente. Dès lors, le délai de quinze jours retenu en matière de soins

psychiatriques contraints peut sembler particulièrement étendu.

23. Il est certes vrai que le régime actuel de l’hospitalisation psychiatrique sous contrainte dispose

déjà d’une voie de recours, ouverte « à quelque époque que ce soit », et donc potentiellement

dès le début de l’hospitalisation10. Mais comme cela a été dit plus haut, l’effectivité du droit au

recours n’est pas assurée partout et pour tous les malades avec le même soin et s’exerce de fait

assez peu. Par ailleurs, la coexistence de ces deux recours pose question, et plus

particulièrement au regard de l’effectivité de cette première voie d’action : l’article L. 3211-

12-3 du CSP qui prévoit la possibilité de statuer conjointement sur les deux recours fait

craindre que le juge ne soit tenté d’attendre le délai de quinze jours pour statuer sur une

éventuelle saisine dès l’admission en hospitalisation, vidant alors de sa substance le recours

intemporel de l’article L. 3211-12 I11 .

24. Au regard de ces préoccupations, la CNCDH se demande si la réforme n’est pas restée au

milieu du gué et s’il n’aurait pas été plus opportun de faire intervenir le contrôle du juge dès la

décision initiale d’hospitalisation et non pas simplement a posteriori.

25. Même si le Conseil constitutionnel n’est pas allé aussi loin, la question peut légitimement être

posée. C’est en effet une solution qui fonctionne apparemment bien dans certains pays qui ont

mis en pratique ce recours au juge dans la réponse au problème. Il est d’autre part clair que le

sort des intéressés n’est pas facilité par la succession de mesures impliquant des

responsabilités successives. On ajoutera que toutes les appréciations reposent évidemment sur

des avis médicaux, dont la contestation est malaisée et ce d’autant plus que le juge

interviendra alors que le diagnostic et même le traitement seront déjà décidés. Pour écarter

cette option pourtant souhaitée par les associations de malades et une partie des magistrats,

l’étude d’impact avance l’argument assez théorique qu’il ne serait pas bon que le juge des

libertés et de la détention appelé à exercer une fonction de contrôle ait pris position dés

l’origine. Mais il a surtout avancé l’argument de la surcharge de travail des juges qui avait

également arrêté la CNCDH lors de son examen en 2008.

10 Article L. 3211-12 I. du CSP.

« Une personne hospitalisée sans son consentement ou retenue dans quelque établissement que ce soit, public ou

privé, qui accueille des malades soignés pour troubles mentaux, son tuteur si elle est mineure, son tuteur ou

curateur si, majeure, elle a été mise sous tutelle ou en curatelle, son conjoint, son concubin, un parent ou une

personne susceptible d'agir dans l'intérêt du malade et éventuellement le curateur à la personne peuvent, à

quelque époque que ce soit, se pourvoir par simple requête devant le juge des libertés et de la détention du

tribunal de grande instance du lieu de la situation de l'établissement qui, statuant en la forme des référés après

débat contradictoire et après les vérifications nécessaires, ordonne, s'il y a lieu, la sortie immédiate. »

11 Article L. 3211-12-3

« Le juge des libertés et de la détention saisi en application de l’article L. 3211-12-1 peut, si un recours a été

formé sur le fondement de l’article L. 3211-12, statuer par une même décision suivant la procédure prévue à

l’article L. 3211-12-1 »

« Le juge des libertés et de la détention saisi en application de l’article L. 3211-12-1 peut, si un recours a été

formé sur le fondement de l’article L. 3211-12, statuer par une même décision suivant la procédure prévue à

l’article L. 3211-12-1. »

7

26. Il semble bien à présent que cet argument ne doit pas déterminer la réponse, à partir du

moment où l’on s’engage dans une réforme d’importance qui modifie les équilibres et exige

en tout cas d’importants investissements. Le partage de compétences crée par lui même

beaucoup de difficultés pour une population très vulnérable et qui peine à exercer ses droits à

l’information et au recours, comme cela a été exposé plus haut.

27. Dans le même ordre d’idée, il est étonnant que le contrôle du juge ne porte pas sur les soins

sans consentement lorsqu’ils sont prescrits en ambulatoire. Le placement des soins

ambulatoires hors du contrôle du juge paraît dénué de fondement : il y aurait au contraire

grand intérêt à ouvrir au juge ce contentieux particulièrement sensible au regard du respect de

la vie privée.

28. On pourrait aussi imaginer qu’il soit fait un bloc de compétences au profit du juge judiciaire,

afin que celui-ci connaisse de l’intégralité du contentieux du soin psychiatrique contraint : la

concurrence entre la compétence du juge administratif pour connaître des décisions du

directeur de l’établissement et celle du juge judiciaire pour décider du maintien de

l’hospitalisation sous contrainte ou de la mainlevée de celle-ci, n’est guère satisfaisante.

29. L’effectivité du pouvoir de contrôle du juge des libertés et de la détention est ainsi une cause

de préoccupation de la CNCDH. La fonction ne dispose pas de statut propre : le juge des

libertés et de la détention est un « magistrat du siège ayant rang de président, de premier viceprésident

ou de vice-président » désigné par le président du tribunal de grande instance, qui

dispose de même du pouvoir de le muter dans d’autres fonctions.12 Il est également

régulièrement pointé du doigt au gré de l’actualité et particulièrement des cas de récidive

pénale. On peut légitimement craindre que cette pression continue ne tende à remettre en

cause l’exercice en toute indépendance de son pouvoir de contrôle des mesures

d’hospitalisation. De même, le projet de loi n’accorde aucune marge de manoeuvre au juge

des libertés et de la détention en terme de pouvoirs d’investigation ou de délai, alors que ce

juge fait déjà face à une insuffisance de moyens alliée à une surcharge de travail. Dans de

telles circonstances, les juges des libertés et de la détention devront composer, au risque de ne

pouvoir, faute de temps et de moyens, jouer pleinement leur rôle de garant des libertés

individuelles. Le recours pourrait alors se résumer à une simple confirmation systématisée des

avis médicaux.

30. Ces expertises médicales soulèvent précisément des interrogations. Dans son avis sur la

maladie mentale et les droits de l’homme du 12 juin 2008, la CNCDH avait déjà souligné ses

préoccupations quant au manque de clarté du discours médical : « On attendrait des

professionnels que, surmontant leurs différences, ils apportent une conférence de consensus

destinée à formuler la manière dont ils décrivent la maladie, à l’usage d’une société peu

informée et d’autorités influencées par le principe de précaution. » Celle-ci ne saurait que

réitérer ses inquiétudes aujourd’hui, alors que la décision du juge des libertés et de la

détention, dont les pouvoirs s’apprêtent à se voir élargis, repose essentiellement sur ces

expertises médicales.

31. La possibilité d’un recours à la visioconférence pour organiser l’audience13 est un autre point

de vive préoccupation de la CNCDH, d’autant que cette visioconférence est envisagée dès lors

que le patient ne s’y opposera pas. Des raisons budgétaires ne sauraient justifier cette pratique

hautement critiquable dans un contentieux qui s’adresse à des personnes en situation, souvent,

d’extrême fragilité. Le dialogue entre le juge et le patient est rendu difficile, sinon impossible,

la place de l’avocat – qui ne pourra se trouver à la fois au tribunal et auprès de son client – lui

interdit en toute hypothèse d’exercer sa fonction dans des conditions satisfaisantes. C’est

donc l’effectivité même du recours organisé sous forme d’auditions à distance qui est

12 Article 137-1 alinéa 2 du code de procédure pénale.

13 Article L. 3211-12-2 du CSP.

8

compromise. Pour ces raisons, la CNCDH exprime sa totale opposition à l’utilisation de la

visioconférence dans les relations entre le juge et les personnes hospitalisées en psychiatrie.

32. Enfin la CNCDH se déclare des plus préoccupée par la procédure de recours suspensif, à

l’initiative du préfet et du directeur de l’établissement d’accueil, qu’instaure le projet de loi.

En cas de désaccord avec la décision de mainlevée du juge, et en cas de « risque grave

d’atteinte à l’intégrité du malade ou d’autrui » ceux-ci pourront demander à ce que soit

maintenu sous le régime de l’hospitalisation complète le patient, le temps que le premier

président de la cour d’appel statue sur le caractère suspensif de l’appel et, le cas échéant, sur le

fond. La CNCDH craint que le principe de précaution n’affecte une fois encore les droits des

patients tout en discréditant les pouvoirs du juge.

***

33. A la lumière des développements qui précédent, la CNCDH en vient à la conclusion que le

projet de loi – en témoignent les constants ajustements dont il fait l’objet au cours de son

parcours d’élaboration – manque de la maturité nécessaire à une réforme convaincante du

régime actuel de prise en charge de la maladie mentale. Il semble que la réflexion ne soit pas

aboutie, tant sur la question du contrôle par l’autorité judiciaire de la mesure de contrainte que

sur celle de la gestion de la contrainte à l’extérieur de l’hôpital psychiatrique. Quant à la

question des moyens suffisants dont la psychiatrie devrait être dotée, elle semble absente de la

réflexion.

34. La réforme introduite par le projet de loi souffre d’une absence de consensus chez les

personnels et les personnes concernées, alors que se joue une bataille pour les moyens et les

effectifs et que des désaccords de principe théorique existent sur la prise en charge en

établissement ou ambulatoire.

35. La CNCDH recommande par conséquent que, dans un premier temps, une réforme de

l’hospitalisation psychiatrique s’en tienne à ce qui est exigé, à l’horizon du 1er août 2011, par

le Conseil constitutionnel, et que la concertation se poursuive sur les autres points. Elle

poursuit quant à elle ses travaux et reste très attentive à la situation créée, en particulier, par

l’importante présence de malades mentaux en prison. Le débat en cours, sur un texte

essentiellement axé sur la protection de la société, ne milite pas en faveur d’une plus grande

acceptation de la présence des malades mentaux dans la cité. Tout porte dès lors à craindre

que l’amalgame qui est fait entre le sort des malades mentaux, jugés par hypothèse dangereux,

et les questions de sécurité, ne se renforce.

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5 avril 2011 2 05 /04 /avril /2011 16:03

1

COMMISSION NATIONALE CONSULTATIVE

DES DROITS DE L’HOMME

Avis sur le projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant

l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge

(Adopté en assemblée plénière le 31 mars 2011)

1. La CNCDH prend l’initiative de se prononcer dans cet avis sur le projet de loi relatif aux

droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités

de leur prise en charge (ci-après le projet de loi) tel qu’issu des travaux de la Commission des

Affaires sociales de l’Assemblée nationale. Celle-ci a apporté des modifications importantes à

un texte qui, déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 5 mai 2010, avait déjà subi, par

le biais d’une lettre rectificative enregistrée le 26 janvier 2011, des adaptations nécessitées par

une décision du Conseil constitutionnel. Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité,

ce dernier s’est en effet prononcé le 26 novembre 2010 sur l’exigence d’un contrôle

juridictionnel du maintien de l’hospitalisation psychiatrique sans consentement1 avant

l’expiration des quinze premiers jours.

2. La CNCDH s’est saisie de ce projet de loi pour les mêmes raisons qui l’avaient poussé, en

2008, à se prononcer sur la maladie mentale et les droits de l’homme2. Dans la mesure où le

traitement de malades qui ont perdu leur discernement peut impliquer, dans leur intérêt et dans

celui de leur entourage, l’hospitalisation sans consentement, une question de liberté est en jeu.

Outre la liberté d’aller et venir, pour ces malades comme pour tout malade, le droit à la sûreté

et l’inviolabilité du corps humain sont des composantes d’une liberté individuelle à laquelle

toutes les garanties doivent être apportées.

3. L’impact de la réforme actuelle, qui était déjà en germe lors des travaux de la CNCDH de

2008, va cependant bien au-delà du champ classique de l’internement. La décision prise sans

le consentement de l’intéressé consacre dorénavant l’entrée dans une phase d’obligation de

soins dont l’hospitalisation ne sera désormais qu’une des modalités possibles et qui pourra

recouvrir des soins ambulatoires sans consentement. La dérogation au droit de tout malade de

consentir aux soins dont il fait l’objet ouvre par conséquent un champ inédit dans la mesure où

la contrainte pourra être exercée entre les murs d’un établissement mais également hors les

murs, sans accroche territoriale, ce qui rend plus difficile tout contrôle de la nécessité ou de la

proportionnalité des mesures prises, ainsi que la sortie de cette situation d’exception.

4. Bien qu’une réforme en profondeur du régime de l’hospitalisation sans consentement, du fait

des mésusages dont il est l’objet et que la CNCDH avait pu constater dans ses travaux

antérieurs, soit un souhait largement partagé par les professionnels, les usagers et leurs

proches, le projet de loi est la cible de critiques très vives, qui dénoncent son caractère

sécuritaire. Déjà en 2008, la CNCDH avait déploré que la question de la maladie mentale ait

été évoquée, dans le débat public, à propos de textes qui ont alimenté l’amalgame et la

confusion avec la délinquance, la violence et la dangerosité. Ici encore l’ensemble du

problème de la prise en charge des personnes relevant de la psychiatrie est abordé à partir des

cas des malades ayant traversé un épisode critique de leur pathologie, lesquels sont

particulièrement visés par de nombreuses dispositions de ce projet de loi. Dans un contexte de

1 La décision du Conseil constitutionnel porte précisément sur l’hospitalisation à la demande d’un tiers.

2 Avis sur la maladie mentale et les droits de l’homme, adopté par l’assemblée plénière du 12 juin 2008.

2

très grande dégradation de la psychiatrie, notamment de secteur, un projet de loi centré sur

« certains patients susceptibles de présenter un danger pour autrui », selon la formule retenue

dans l’exposé des motifs, ne manque pas d’interroger.

5. Tant les conditions de prise en charge qui peuvent être imposées à un malade, dans un

parcours de soins psychiatriques inédit, que l’institution d’un contrôle systématique par le juge

du maintien en soins sans consentement, ont un impact considérable sur les droits des

malades. Ces questions traitées dans le projet de loi appellent un certain nombre de remarques

et soulèvent des questions que cet avis entend soumettre à la réflexion.

***

Les conditions actuelles de prise en charge d’un malade sans son consentement

6. Aujourd’hui, le code de la santé publique (ci-après CSP) fixe les modalités de l’hospitalisation

psychiatrique qui peut être libre ou intervenir sans le consentement de l’intéressé.

L’hospitalisation est prononcée à la demande d’un tiers lorsque les troubles rendent

impossibles le consentement et que l’état de la personne impose des soins immédiats assortis

d’une surveillance constante en milieu hospitalier (art. L.3212-1 du CSP). La demande est

alors accompagnée de deux certificats médicaux datant de moins de quinze jours, dont un au

moins ne doit pas avoir été établi par un médecin exerçant dans l’établissement qui va

accueillir le malade. A titre exceptionnel et en cas de péril imminent, le régime actuel prévoit

déjà que le directeur de l’établissement peut prononcer l’admission au vu d’un seul certificat

médical émanant éventuellement d’un médecin exerçant dans l’établissement d’accueil et

accompagné d’une demande formulée par un tiers.

7. Une hospitalisation à la demande d’un tiers prend fin dès qu’un psychiatre de l’établissement,

dans un certificat médical circonstancié, certifie qu’elle n’a plus lieu d’être. La levée de la

mesure peut également émaner du préfet ou intervenir sur demande du curateur, du conjoint,

des ascendants ou descendants majeurs, de la personne ayant signé la demande

d’hospitalisation ou d’une personne autorisée par le conseil de famille, enfin de la commission

départementale des hospitalisations psychiatriques. Le représentant de l’Etat peut s’opposer

provisoirement à la sortie et au besoin ordonner en lieu et place une hospitalisation d’office.

8. L’hospitalisation d’office quant à elle est prononcée, lorsque les troubles mentaux

compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public, par

arrêté du préfet de police à Paris et du représentant de l’Etat dans les départements, au vu d’un

certificat médical circonstancié ne pouvant émaner d’un médecin exerçant dans

l’établissement d’accueil (art. L.3213-1 du CSP). En cas de danger imminent pour la sûreté

des personnes, qui peut être attesté par la simple notoriété publique, le maire et, à Paris, les

commissaires de police, peuvent prononcer des mesures provisoires que le représentant de

l’Etat doit confirmer dans les vingt-quatre heures (art. L.3213-1 et suivants du CSP). La

CNCDH avait constaté dans ses travaux de 2008 que les mesures provisoires prononcées par

des maires était d’usage fréquent et répondait aux difficultés de trouver un tiers.

9. La mainlevée de l’hospitalisation d’office est acquise si le représentant de l’Etat n’en

renouvelle pas l’arrêté, dans les trois jours précédant l’expiration du premier mois

d’hospitalisation, puis des trois mois suivants, et ensuite de six mois en six mois. Le préfet

peut également mettre fin à cette hospitalisation à tout moment. La sortie des personnes dont

l’irresponsabilité pénale est due à un trouble mental est subordonnée aux décisions conformes

de deux psychiatres n’appartenant pas à l’établissement (art. L.3213-8 du CSP).

10. Le régime actuel prévoit des sorties d’essai, qui sont définies comme des aménagements des

conditions de traitement des personnes hospitalisées sans leur consentement. Ces sorties

3

comportent une surveillance médicale. Elles ne peuvent excéder une durée de trois mois mais

sont renouvelables et, dans les faits, se prolongent parfois pendant plusieurs années.

Les innovations introduites par le projet de loi

11. Le projet de loi introduit des modifications substantielles au régime actuel. L’hospitalisation

complète sans consentement devient l’une des phases ou modalités d’un parcours de soins

sans consentement impliquant des obligations ou contraintes qui peuvent s’exercer en

établissement, mais aussi hors des murs, au domicile ou dans d’autres lieux de vie, comme par

exemple dans une habitation protégée ou dans une maison de retraite. La prise en charge passe

obligatoirement par un séjour de soixante douze heures en établissement et sous forme d’une

hospitalisation complète, où sont définies les modalités de prise en charge. La responsabilité

de cette période d’examen incombe en tout état de cause à un directeur d’établissement, lequel

peut être privé. Cette mesure initiale est certes prise à des fins de diagnostic mais elle est bel et

bien une mesure de contrainte puisque les dispositions dérogatoires permettant une

hospitalisation sans consentement sont renforcées. Ainsi, les personnes aujourd’hui

hospitalisées à la demande d’un tiers pourront toujours être admises en soins psychiatriques

sans consentement à la demande d’un tiers mais aussi, en l’absence de celui-ci et en cas de

péril imminent, sur décision du directeur d’hôpital qui se prononcera au vu d’un seul certificat

médical émanant, le cas échéant, d’un médecin exerçant dans l’établissement (nouvelle

rédaction de l’article L.3212-3).

12. A l’issue de ces soixante douze heures, l’hospitalisation peut être prolongée ou faire place à un

autre protocole de soins. La gestion du suivi en établissement relève de celui-ci, sous réserve

de nouvelles conditions. En effet les sorties d’essai sont supprimées et les modifications du

statut du malade organisées. Elles aboutissent à un statut rigoureux, tout particulièrement pour

certains malades définis, semble-t-il, comme dangereux, en vertu de critères qui ne relèvent

pas d’une analyse individuelle de leur état. Il s’agit de ceux qui sont là par suite d’une décision

de justice déclarant leur irresponsabilité pénale, ou qui seraient à un moment donné passés par

une unité pour malades difficiles. Pour ceux là, il n’est possible de sortir ou de voir lever la

contrainte qu’après une procédure renforcée, le recours à des expertises multipliées ou à des

autorisations prolongeant d’autant la durée de l’internement. Pour les malades faisant l’objet

de soins à la demande d’un tiers ou en cas de péril imminent (nouvelle procédure en l’absence

de tiers demandeur), il importe de noter qu’à l’avenir, la levée des contraintes pourra survenir

sur demande du tiers mais que le directeur de l’établissement ne sera pas tenu d’y faire droit si

un péril imminent pour la santé du patient est établi (nouvelle rédaction de l’article L.3212-9

du CSP).

Interrogations sur le régime à venir

13. Ce nouveau régime est loin de faire l’unanimité chez les professionnels, les malades et leurs

proches. Leurs inquiétudes, de tous ordres s’agissant de procédures complexes, se focalisent

sur la crainte que la réforme renforce au-delà de l’indispensable la contrainte pesant sur les

malades. La CNCDH partage cette crainte. Elle avait en effet constaté le renforcement en

France du recours à l’hospitalisation, à la différence de pays comparables et en renonciation

progressive à une politique du secteur qui avait suscité de grands espoirs. Elle constate surtout

une inégalité incompréhensible pour de seules raisons médicales des pratiques sur le territoire.

14. Dans un contexte marqué par une insuffisance de moyens et des difficultés de recrutement des

spécialistes médicaux et infirmiers, une concurrence non résolue entre les dépenses exigées

pour les établissements et la médecine des secteurs, ce séjour obligatoire en établissement

favorise la formule de l’internement. En outre le système d’expertise sur lequel repose tout le

jeu des certificats et l’examen par un collège des différentes étapes est jugé par beaucoup

4

insuffisant en effectifs, en qualité et surtout inégalement réparti. La CNCDH craint qu’il ne

puisse, par manque d’autorité, dégager le sort des malades mentaux de l’amalgame qui

conduit à privilégier un point de vue sécuritaire, et, pour éviter tout risque, enfermer plutôt que

d’organiser les moyens d’un accompagnement.

15. A cela s’ajoute le fait que la loi reste bien floue sur la portée réelle, en termes de libertés

publiques, de cette importante innovation que constituent les soins sans consentement.

Qu’impliquent-ils en pratique pour le droit d’aller et venir, de protection du domicile, de

rapports avec les proches et dans d’autres lieux de vie, qu’en est-il du libre choix de son

médecin, des actes de la vie courante ? Les conséquences d’un refus de se prêter au traitement

sont-elles le retour ou l’envoi en établissement ? Il est difficile à la seule lecture du projet de

mesurer les véritables sujétions autres que médicales qui doivent être précisées et assorties de

garanties.

16. En conséquence, malgré les précisions apportées par le texte, la CNCDH a le sentiment que la

concertation permettant un véritable consensus dans ce domaine très sensible n’est pas allée

assez loin et que la concomitance des réformes et des moyens n’est pas réalisée. Le patient

sera plus isolé que jamais dans une société hostile et face à une réforme dont il constituera le

« cobaye ». Plus particulièrement, il ne paraît pas acceptable de retenir des critères comme le

passage devant la justice ou dans telle unité des établissements pour imposer à un malade,

parce qu’il a eu un épisode critique, un régime juridique plus sévère. Il a droit à ce que

l’appréciation de son cas se fasse sur la seule base des nécessités de son traitement et sous la

responsabilité de son médecin qui doit évidemment appréhender tous les problèmes liés à la

vie en société de son malade.

***

Les droits des patients

17. En contrepartie d’une réforme à l’évidente portée contraignante, le projet de loi est

parfaitement conscient de la nécessité de renforcer les droits des intéressés. Ceux-ci disposent

dans le régime actuel de voies d’information, de réclamation et de recours que le projet entend

faciliter. Dès à présent des commissions départementales des hospitalisations psychiatriques3

peuvent examiner les conditions d’hospitalisation, le juge administratif peut sur recours statuer

sur la régularité des différentes procédures d’admission, au besoin en référé, et à tout moment

l’autorité judiciaire, le juge de la liberté et de la détention, peut en tant que garant de la liberté

individuelle se prononcer sur le bien fondé de la mesure d’hospitalisation. Le Contrôleur

général des lieux de privation de liberté s’ajoute à la liste des autorités avec lesquelles le

malade peut communiquer (nouvelle rédaction du deuxième alinéa de l’article L. 3211-3 du

CSP).

18. La CNCDH prend acte des aménagements que le texte institue pour renforcer la motivation

des décisions, le droit d’être informé et les conseils dont l’intéressé peut s’entourer. Des

études qu’elle a menées, il ressort cependant qu’il est très difficile, s’agissant de ces malades,

d’assurer l’effectivité de ces droits. Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté

apporte sur ce point des données très éclairantes. Le simple fait que, pour des raisons

médicales ou de gestion, des malades soient mis à l’isolement ou coupés de contacts avec des

proches ou des tiers, ce qui est une éventualité courante, est en contradiction avec l’exercice

de tels droits. Or il n’est pas rare que ces pratiques d’isolement s’appliquent dans un

établissement sans considération de l’origine des malades et que même des malades venus

3 Elles deviennent dans le projet de loi des commissions départementales des soins psychiatriques et leur

intervention ne devient obligatoire que pour les personnes en soins sans consentement en cas de péril imminent

ou dont les soins se prolongent au-delà d’une durée d’un an, au lieu de trois mois actuellement. Ce resserrement

de leurs missions répond à des difficultés attestées de leur fonctionnement.

5

librement ou sur demande d’un tiers concerné y soient assujettis. Un malentendu de principe

existe puisqu’il s’agit d’être informé, de discuter et de faire tomber le cas échéant des mesures

dont la raison d’être est le traitement et que le malade n’est pas toujours à même d’apprécier

avec discernement. La CNCDH estime cependant que les procédures classiques destinées à

garantir les libertés publiques, et plus exactement la possibilité de faire appel à un conseil, ont

leur place dans ces situations de contrainte à portée médicale. La présence renforcée des

avocats dans les établissements peut être la condition nécessaire à l’exercice des droits.

Le contrôle du juge sur les décisions prises sans le consentement du malade

19. En matière de renforcement des droits des malades, l’introduction d’un contrôle judiciaire a

posteriori systématique des hospitalisations sans consentement est une disposition centrale du

projet de loi. La CNCDH, qui n’avait pas antérieurement penché pour la judiciarisation des

décisions en cause, reconnaît la valeur des arguments avancés pour renforcer en la matière le

rôle du juge judiciaire. Il est non seulement, en ce domaine comme ailleurs, garant de par la

Constitution de la liberté individuelle, mais son intervention offre en outre à l’intéressé les

avantages d’une procédure ouverte et d’un débat contradictoire ; elle se recommande

d’ailleurs de l’exemple de la plupart des pays européens ressemblant au nôtre. Bien que le

système antérieur n’ait pas été privé de garanties, il convient sans aucun doute – et le Conseil

constitutionnel ayant tranché – de franchir ce pas. Pour autant, certaines questions importantes

demeurent pendantes concernant la mise en oeuvre de ce nouveau statut et le champ de la

réforme.

20. Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel, dans sa

décision du 26 novembre 2010, s’est prononcé en faveur d’une judiciarisation du contrôle de

l’hospitalisation sous contrainte, considérant que « la liberté individuelle ne peut être tenue

pour sauvegardée que si le juge intervient dans le plus court délai possible ; […] en prévoyant

que l'hospitalisation sans consentement peut être maintenue au delà de quinze jours sans

intervention d'une juridiction de l'ordre judiciaire, les dispositions de l'article L. 337 [actuel

article L. 3212-7] méconnaissent les exigences de l'article 66 de la Constitution »4.

21. Afin de se conformer aux exigences constitutionnelles, le projet de loi prévoit un contrôle

systématique du juge des libertés et de la détention pour toute hospitalisation complète se

prolongeant au-delà de 15 jours, puis de nouveau, avant l’expiration d’un délai de 6 mois5. Ce

contrôle s’initie par une saisine par le directeur de l’établissement d’accueil ou le représentant

de l’État dans le département6. Le juge des libertés et de la détention statue après débat

contradictoire, au cours duquel la personne hospitalisée, assistée d’un avocat, est entendue7. Il

dispose à l’appui d’un avis médical conjoint émanant de deux psychiatres de l’établissement

d’accueil8. Le juge est habilité à ordonner le maintien en hospitalisation complète, sa

mainlevée ou encore sa substitution avec une prise en charge sous forme ambulatoire9.

4 Décision du Conseil constitutionnel n° 2010−71 – Question prioritaire de constitutionnalité, décision du 26

novembre 2010

5 Projet de loi du 5 mai 2010, modifié par lettre rectificative du 26 janvier 2011,

Article L. 3211-12-1. – I. du CSP « L’hospitalisation complète d’un patient sans son consentement ne peut se

poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention […] n’ait statué sur cette mesure […] avant

l’expiration d’un délai de quinze jours à compter de l’admission prononcée en application du chapitre II ou du

chapitre III du présent titre ou de l’article L. 3214-3 » […]

6 Article L. 3211-12-1 I du CSP.

7 Article L. 3211-12-2 du CSP.

8 Article L. 3211-12-1 II du CSP.

9 La discussion en séance publique à l’Assemblée nationale a retiré au juge le pouvoir d’ordonner une autre

forme de prise en charge que l’hospitalisation complète, pouvoir qui avait été introduit par la commission des

Affaires sociales au cours de ses travaux. Articles L. 3211-12-1 I et III du CSP.

6

22. Le Conseil constitutionnel s’est également prononcé sur l’opportunité d’un contrôle a priori

du juge judiciaire, considérant que « si l'article 66 de la Constitution exige que toute

privation de liberté soit placée sous le contrôle de l'autorité judiciaire, il n'impose pas que

cette dernière soit saisie préalablement à toute mesure de privation de liberté ».

Comparativement, dans d’autres domaines de privation de liberté où le juge constitutionnel a

été appelé à statuer, le « plus court délai possible » d’intervention du juge judiciaire sur le

fondement de l’article 66 de la Constitution s’est traduit en un délai de 48 heures ; ainsi en estil

par exemple en matière d’enfermement des étrangers en situation irrégulière, en rétention

aussi bien qu’en zone d’attente. Dès lors, le délai de quinze jours retenu en matière de soins

psychiatriques contraints peut sembler particulièrement étendu.

23. Il est certes vrai que le régime actuel de l’hospitalisation psychiatrique sous contrainte dispose

déjà d’une voie de recours, ouverte « à quelque époque que ce soit », et donc potentiellement

dès le début de l’hospitalisation10. Mais comme cela a été dit plus haut, l’effectivité du droit au

recours n’est pas assurée partout et pour tous les malades avec le même soin et s’exerce de fait

assez peu. Par ailleurs, la coexistence de ces deux recours pose question, et plus

particulièrement au regard de l’effectivité de cette première voie d’action : l’article L. 3211-

12-3 du CSP qui prévoit la possibilité de statuer conjointement sur les deux recours fait

craindre que le juge ne soit tenté d’attendre le délai de quinze jours pour statuer sur une

éventuelle saisine dès l’admission en hospitalisation, vidant alors de sa substance le recours

intemporel de l’article L. 3211-12 I11 .

24. Au regard de ces préoccupations, la CNCDH se demande si la réforme n’est pas restée au

milieu du gué et s’il n’aurait pas été plus opportun de faire intervenir le contrôle du juge dès la

décision initiale d’hospitalisation et non pas simplement a posteriori.

25. Même si le Conseil constitutionnel n’est pas allé aussi loin, la question peut légitimement être

posée. C’est en effet une solution qui fonctionne apparemment bien dans certains pays qui ont

mis en pratique ce recours au juge dans la réponse au problème. Il est d’autre part clair que le

sort des intéressés n’est pas facilité par la succession de mesures impliquant des

responsabilités successives. On ajoutera que toutes les appréciations reposent évidemment sur

des avis médicaux, dont la contestation est malaisée et ce d’autant plus que le juge

interviendra alors que le diagnostic et même le traitement seront déjà décidés. Pour écarter

cette option pourtant souhaitée par les associations de malades et une partie des magistrats,

l’étude d’impact avance l’argument assez théorique qu’il ne serait pas bon que le juge des

libertés et de la détention appelé à exercer une fonction de contrôle ait pris position dés

l’origine. Mais il a surtout avancé l’argument de la surcharge de travail des juges qui avait

également arrêté la CNCDH lors de son examen en 2008.

10 Article L. 3211-12 I. du CSP.

« Une personne hospitalisée sans son consentement ou retenue dans quelque établissement que ce soit, public ou

privé, qui accueille des malades soignés pour troubles mentaux, son tuteur si elle est mineure, son tuteur ou

curateur si, majeure, elle a été mise sous tutelle ou en curatelle, son conjoint, son concubin, un parent ou une

personne susceptible d'agir dans l'intérêt du malade et éventuellement le curateur à la personne peuvent, à

quelque époque que ce soit, se pourvoir par simple requête devant le juge des libertés et de la détention du

tribunal de grande instance du lieu de la situation de l'établissement qui, statuant en la forme des référés après

débat contradictoire et après les vérifications nécessaires, ordonne, s'il y a lieu, la sortie immédiate. »

11 Article L. 3211-12-3

« Le juge des libertés et de la détention saisi en application de l’article L. 3211-12-1 peut, si un recours a été

formé sur le fondement de l’article L. 3211-12, statuer par une même décision suivant la procédure prévue à

l’article L. 3211-12-1 »

« Le juge des libertés et de la détention saisi en application de l’article L. 3211-12-1 peut, si un recours a été

formé sur le fondement de l’article L. 3211-12, statuer par une même décision suivant la procédure prévue à

l’article L. 3211-12-1. »

7

26. Il semble bien à présent que cet argument ne doit pas déterminer la réponse, à partir du

moment où l’on s’engage dans une réforme d’importance qui modifie les équilibres et exige

en tout cas d’importants investissements. Le partage de compétences crée par lui même

beaucoup de difficultés pour une population très vulnérable et qui peine à exercer ses droits à

l’information et au recours, comme cela a été exposé plus haut.

27. Dans le même ordre d’idée, il est étonnant que le contrôle du juge ne porte pas sur les soins

sans consentement lorsqu’ils sont prescrits en ambulatoire. Le placement des soins

ambulatoires hors du contrôle du juge paraît dénué de fondement : il y aurait au contraire

grand intérêt à ouvrir au juge ce contentieux particulièrement sensible au regard du respect de

la vie privée.

28. On pourrait aussi imaginer qu’il soit fait un bloc de compétences au profit du juge judiciaire,

afin que celui-ci connaisse de l’intégralité du contentieux du soin psychiatrique contraint : la

concurrence entre la compétence du juge administratif pour connaître des décisions du

directeur de l’établissement et celle du juge judiciaire pour décider du maintien de

l’hospitalisation sous contrainte ou de la mainlevée de celle-ci, n’est guère satisfaisante.

29. L’effectivité du pouvoir de contrôle du juge des libertés et de la détention est ainsi une cause

de préoccupation de la CNCDH. La fonction ne dispose pas de statut propre : le juge des

libertés et de la détention est un « magistrat du siège ayant rang de président, de premier viceprésident

ou de vice-président » désigné par le président du tribunal de grande instance, qui

dispose de même du pouvoir de le muter dans d’autres fonctions.12 Il est également

régulièrement pointé du doigt au gré de l’actualité et particulièrement des cas de récidive

pénale. On peut légitimement craindre que cette pression continue ne tende à remettre en

cause l’exercice en toute indépendance de son pouvoir de contrôle des mesures

d’hospitalisation. De même, le projet de loi n’accorde aucune marge de manoeuvre au juge

des libertés et de la détention en terme de pouvoirs d’investigation ou de délai, alors que ce

juge fait déjà face à une insuffisance de moyens alliée à une surcharge de travail. Dans de

telles circonstances, les juges des libertés et de la détention devront composer, au risque de ne

pouvoir, faute de temps et de moyens, jouer pleinement leur rôle de garant des libertés

individuelles. Le recours pourrait alors se résumer à une simple confirmation systématisée des

avis médicaux.

30. Ces expertises médicales soulèvent précisément des interrogations. Dans son avis sur la

maladie mentale et les droits de l’homme du 12 juin 2008, la CNCDH avait déjà souligné ses

préoccupations quant au manque de clarté du discours médical : « On attendrait des

professionnels que, surmontant leurs différences, ils apportent une conférence de consensus

destinée à formuler la manière dont ils décrivent la maladie, à l’usage d’une société peu

informée et d’autorités influencées par le principe de précaution. » Celle-ci ne saurait que

réitérer ses inquiétudes aujourd’hui, alors que la décision du juge des libertés et de la

détention, dont les pouvoirs s’apprêtent à se voir élargis, repose essentiellement sur ces

expertises médicales.

31. La possibilité d’un recours à la visioconférence pour organiser l’audience13 est un autre point

de vive préoccupation de la CNCDH, d’autant que cette visioconférence est envisagée dès lors

que le patient ne s’y opposera pas. Des raisons budgétaires ne sauraient justifier cette pratique

hautement critiquable dans un contentieux qui s’adresse à des personnes en situation, souvent,

d’extrême fragilité. Le dialogue entre le juge et le patient est rendu difficile, sinon impossible,

la place de l’avocat – qui ne pourra se trouver à la fois au tribunal et auprès de son client – lui

interdit en toute hypothèse d’exercer sa fonction dans des conditions satisfaisantes. C’est

donc l’effectivité même du recours organisé sous forme d’auditions à distance qui est

12 Article 137-1 alinéa 2 du code de procédure pénale.

13 Article L. 3211-12-2 du CSP.

8

compromise. Pour ces raisons, la CNCDH exprime sa totale opposition à l’utilisation de la

visioconférence dans les relations entre le juge et les personnes hospitalisées en psychiatrie.

32. Enfin la CNCDH se déclare des plus préoccupée par la procédure de recours suspensif, à

l’initiative du préfet et du directeur de l’établissement d’accueil, qu’instaure le projet de loi.

En cas de désaccord avec la décision de mainlevée du juge, et en cas de « risque grave

d’atteinte à l’intégrité du malade ou d’autrui » ceux-ci pourront demander à ce que soit

maintenu sous le régime de l’hospitalisation complète le patient, le temps que le premier

président de la cour d’appel statue sur le caractère suspensif de l’appel et, le cas échéant, sur le

fond. La CNCDH craint que le principe de précaution n’affecte une fois encore les droits des

patients tout en discréditant les pouvoirs du juge.

***

33. A la lumière des développements qui précédent, la CNCDH en vient à la conclusion que le

projet de loi – en témoignent les constants ajustements dont il fait l’objet au cours de son

parcours d’élaboration – manque de la maturité nécessaire à une réforme convaincante du

régime actuel de prise en charge de la maladie mentale. Il semble que la réflexion ne soit pas

aboutie, tant sur la question du contrôle par l’autorité judiciaire de la mesure de contrainte que

sur celle de la gestion de la contrainte à l’extérieur de l’hôpital psychiatrique. Quant à la

question des moyens suffisants dont la psychiatrie devrait être dotée, elle semble absente de la

réflexion.

34. La réforme introduite par le projet de loi souffre d’une absence de consensus chez les

personnels et les personnes concernées, alors que se joue une bataille pour les moyens et les

effectifs et que des désaccords de principe théorique existent sur la prise en charge en

établissement ou ambulatoire.

35. La CNCDH recommande par conséquent que, dans un premier temps, une réforme de

l’hospitalisation psychiatrique s’en tienne à ce qui est exigé, à l’horizon du 1er août 2011, par

le Conseil constitutionnel, et que la concertation se poursuive sur les autres points. Elle

poursuit quant à elle ses travaux et reste très attentive à la situation créée, en particulier, par

l’importante présence de malades mentaux en prison. Le débat en cours, sur un texte

essentiellement axé sur la protection de la société, ne milite pas en faveur d’une plus grande

acceptation de la présence des malades mentaux dans la cité. Tout porte dès lors à craindre

que l’amalgame qui est fait entre le sort des malades mentaux, jugés par hypothèse dangereux,

et les questions de sécurité, ne se renforce.

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21 mars 2011 1 21 /03 /mars /2011 10:09

  le Jura Libertaire

 

Les medias nous ont appris que le jeudi 24 février, une mutinerie avait eu lieu au centre pénitentiaire de Saint-Quentin Fallavier. Comme toujours dans les «grands» medias, nous n’avons entendu que le point de vue des syndicats de surveillants. En tous cas surtout pas celui des prisonniers révoltés. Nous (des animateurs d’émissions de radio anti-carcérales de saint-Étienne et de Valence) sommes allés devant la prison pour chercher d’autres sons de cloche…

 

 

 

 

On nous avait dit dans les journaux et à la télé qu’une quarantaine de détenus avaient refusé de retourner en cellule après la promenade, et qu’ils avaient détruit des grillages.

 

Des ÉRIS (Équipes Régionales d’Intervention et de Sécurité) étaient alors intervenues en grand nombre (3 à 6 cars selon les versions). Ce sont des équipes spéciales de surveillants pénitentiaires, super équipés, super entraînés, et cagoulés, qui interviennent entre autres pour ramener l’ordre dans les prisons [À savoir que des témoignages répétés montrent comment le rôle des ÉRIS, c’est d’être violents. Par exemple, trois prisonniers ont porté plainte pour «violence» de la part des ÉRIS qui les ont selon eux tabassés en cellule à la prison de Corbas, suite à des mouvements de protestations.].

 

Cela s’est passé à l’heure des parloirs, donc des personnes venues visiter un proche détenu étaient devant la prison. Elles ont entendu des tirs à l’intérieur et vu deux ambulances entrer et sortir. Une centaine de gendarmes sont aussi intervenus.

 

La version «officielle», c’est-à-dire celle des syndicats de surveillants, est que cette révolte est causée par la nourriture servie par la Sodexo, entreprise privée qui gère la nourriture servie aux prisonniers depuis janvier : viande avariée, rupture de la chaîne du froid…

 

Le syndicat UFAP pénitentiaire de saint-Quentin avait par ailleurs publié deux communiqués une semaine avant ce mouvement de révolte : ils dénonçaient les tensions internes à la prison, comme toujours imputées uniquement à la violence des détenus. Ils demandaient qu’un grand nombre de prisonniers soit transféré afin de rétablir l’ordre, et sollicitaient le soutien des autorités et la présence des ÉRIS pour «parer à l’éventualité d’une rebellion organisée par la population pénale» et «sécuriser le personnel».

 

Ils dénonçaient aussi déjà, une semaine avant la révolte, les problèmes graves liés à la gestion de la nourriture par la Sodexo. On aurait pu croire qu’ils dénonçaient cela par compassion pour les détenus. Mais non : ils craignaient que ces derniers, exaspérés ne se rebellent et que cela pose un problème de sécurité !

 

Bref, une semaine avant le blocage de la promenade par quelques dizaines de détenus, les syndicats de surveillants affirmaient que la situation était tendue, notamment à cause des problèmes de nourriture, et ils demandaient un renfort sécuritaire.

 

Une fois de plus les surveillants dénoncent ce qui se passe en prison uniquement du point de vue de la sécurité et de leur sécurité. Ils se plaignent et demandent uniquement des moyens répressifs. Ils ont quasiment le monopole de la parole au sujet de la prison et en donnent une vision très subjective.

 

Décrire les surveillants comme désemparés et désarmés face à des détenus violents et impunis est une technique fréquente de la part de leurs syndicats. Souvent, quand on écoute la parole des prisonniers, elle dit autre chose… !

 

 

Cette révolte nous touche

 

Nous ne savons pas précisément ce qui l’a déclenchée ni comment elle s’est déroulée mais nous savons que les prisonniers ont 1000 raisons de se révolter, que leur parole ne circule quasiment pas à l’extérieur, et que le moindre mouvement de protestation en prison est très durement réprimé..

Donc nous sommes allés devant la prison une semaine après ce mouvement pour recueillir infos et témoignages, pour faire circuler d’autres versions que celles de l’AP et des syndicats de surveillants. Nous avons discuté avec des détenus du centre de semi-liberté [
bâtiment à l’écart du reste de la prison, dont les détenus peuvent sortir une partie de la journée, pour travailler ou chercher un emploi], et avec les gens qui allaient voir un proche au parloir, pour leur demander s’ils pouvaient faire sortir des informations et proposer du soutien face à la répression, si nécessaire.

 

Voilà les quelques infos que nous avons recueillies. Bien entendu elles sont partielles et il y a diverses versions, car il est très difficile d’obtenir des infos sur ce qui se passe derrière les murs. Nous ne prétendons pas à une quelconque objectivité, mais c’est sûr que ces paroles sont révélatrices d’autres sons de cloches que ceux de l’Administration Pénitentiaire.

 

Des dizaines de prisonniers de la maison d’arrêt [le centre pénitentiaire de saint-Quentin comporte une maison d’arrêt, un centre de détention et un centre de semi-liberté] avaient donc refusé de rentrer en cellule à 11h à la fin de la promenade, et ce jusqu’à 15h.

 

Tout le monde nous a dit que, suite à ce blocage, il y avait eu de 30 à 40 transferts (détenus déplacés dans une autre prison pour casser la rebellion et sanctionner, isoler et éloigner certains prisonniers), certains ont notamment été envoyés en région parisienne.

 

Et tout le monde nous a dit que les mitards (cellules du quartier disciplinaire) étaient remplis, soit une trentaine de personnes ainsi punies. Déjà, pas besoin d’être un fin mathématicien pour constater que 60 ou 70 personnes ont été sanctionnées alors qu’on nous parlait de 30 prisonniers qui bloquaient la cour. Souvenons-nous qu’avant même ce mouvement, les syndicats demandaient un transfert en nombre. Ils ont obtenu ce qu’ils voulaient : faire taire et calmer les prisonniers.

 

Autre sanction collective : de nombreuses personnes nous ont rapporté que sur au moins un étage entier (et probablement toute la prison), les prisonniers ont été enfermés en cellule pendant au minimum 4 jours sans aucune sortie, aucune promenade, rien. De quoi devenir fou. Ce genre de punition collective suite à une révolte en prison, qui touche tous les prisonniers même ceux qui n’y ont pas participé, est une technique systématique de répression en prison. Même les détenus du centre de semi-liberté qui, à l’écart, n’ont absolument pas participé, ont été enfermés en cellule tout le week-end. Le prétexte fourni : le manque de personnel. Un détenu en semi-liberté nous fait remarquer que pourtant, depuis la privatisation d’une grande partie des services quotidiens dans la prison, les surveillants sont aussi nombreux alors qu’ils ont moins de travail : ils ne gèrent quasiment plus que la surveillance et la sécurité.

 

Ensuite, on nous a parlé d’un déploiement d’ERIS et de gendarmes énorme. Imaginez des détenus désarmés face à une armée de robocops cagoulés. Évidemment les forces sont démesurées et déséquilibrées. On sait qu’il y a eu des tirs de flashballs, des détenus tabassés, avec au moins un bras cassé.

 

Il nous semblerait logique que des détenus subissent aussi la répression judiciaire mais nous n’arrivons pas à savoir si des procès sont prévus. Il serait important de se renseigner sur ces procès et de soutenir les accusés.

 

Plusieurs personnes ont confirmé la version officielle : la cause du mécontentement était la bouffe avariée servie par la Sodexo. Mais d’autres nous ont aussi expliqué qu’une fouille de cellules avait eu lieu la veille à 21h, ce qui semble peu réglementaire, et avait dans tous les cas passablement énervé les détenus. Une fouille est une sorte de perquisition de cellule lors de laquelle les affaires personnelles peuvent être mises sens dessus dessous, renversées, abîmées… Des dizaines de prisonniers auraient alors décidé de protester en organisant pour le lendemain le blocage de la promenade.

 

Une autre version rapporte que les «détenus incontrôlables» seraient un groupe de jeunes détenus faisant des gags aux surveillants : se cacher dans la cellule d’un autre, jeter du dentifrice dans le dos d’un surveillant, etc. Tout serait parti de là.

 

Quand on leur a demandé s’ils connaissaient les raisons de ce mouvement, les prisonniers du centre de semi-liberté ou les proches en ont raconté plusieurs, et ont révélé en fin de compte qu’une longue liste de mécontentements, cumulés, ont pu mener à cette révolte :

— Depuis leur privatisation, les cantines (système par lequel les prisonniers peuvent acheter des produits par correspondance) fonctionnent n’importe comment : on reçoit de la lessive alors qu’on avait demandé du café, etc.
— La nourriture est infâme,
— Quand ils sont deux en cellule, les détenus paient chacun pour une seule télé et un seul frigo… donc ils paient double !
— Les activités sont quasi inexistantes et pas satisfaisantes,
— …

 

Ça nous semble important de soutenir des prisonniers qui se révoltent, de faire savoir ce qui s’est passé, pourquoi et comment…

 

Il nous a semblé que des gens avaient envie de parler mais avaient un peu peur. Face à la machine carcérale, la méfiance est un réflexe. Les prisonniers n’ont pas l’habitude qu’on leur propose de parler et qu’on s’intéresse à ce qu’ils ont à dire. Pourtant ça nous semble primordial. Le silence autour de ces évènements nous effraie.

 

Bref, nous cherchons toujours des informations sur cette révolte et ses suites !

 

Nous cherchons de manière générale des infos, témoignages et points de vue sur la prison.

 

Écrivez-nous !

Émission Papillon chez Radio Dio
14 bis rue de Roubaix - BP 51
42002 Saint-Étienne cedex 1

 

Écoutez-nous !

L’émission Papillon est diffusée en direct sur Radio Dio, 89.5FM à saint-Étienne, le 1er dimanche du mois, de 17h30 à 19h (écoutable à la Maison d’arrêt de la Talaudière). Écoutable en direct sur internet. Elle est aussi rediffusée le 3e mardi du mois à 20h sur Radio Canut, 102.2 FM à Lyon, donc écoutable entre autres à la Maison d’arrêt de Corbas.

 

À noter qu’un autre mouvement de révolte a eu lieu quelques semaines plutôt à la Maison d’arrêt du Val d’Oise, à Osny. Fait très rare : au bout d’une semaine de tensions et de protestations, c’est deux cent prisonniers qui ont fini par refuser de remonter en cellule. Comme toujours : répression féroce, transferts, sanctions disciplinaires et procès… Et on n’entend nulle part le point de vue des prisonniers eux-mêmes.

 

Papillon (contact) 
Numéro Zéro - saintÉtienne, 20 mars 2011.

 

 

 

 

Isère : La malbouffe s'invite à la prison de Saint-Quentin-Fallavier

 

Des cadres de Sodexo ont été suspendus pour avoir servi des plats périmés aux détenus… 

 

Des yaourts et de la viande avariés. Voilà ce qui était au menu des détenus de la prison de Saint-Quentin-Fallavier (Isère), où depuis début janvier, la préparation des plats a été confiée à Sodexo.

 

Selon nos informations, la société vient de suspendre ses deux responsables de la restauration au sein de la maison d'arrêt en raison de manquements graves aux procédures d'hygiène.

 

Des risques élevés d'intoxication alimentaire

 

«Lors d'une inspection réalisée en février, on s'est aperçu que la date limite de consommation de nombreux produits était largement dépassée», dénonce Pascal Rossignol, délégué régional de l'Ufap-Unsa. Ce syndicat des personnels pénitentiaires avait alerté à plusieurs reprises sa direction de la piètre qualité des plats servis aux détenus.

 

«Poches de viandes verdâtres et nauséabondes», «cuisine sale», «rupture de la chaîne du froid»… Des «actes de malveillance» qui, selon l'Ufap, ont exposé les détenus à un risque élevé d'intoxication alimentaire. «Lors de l'inspection, le départ des plats avariés a été bloqué. Mais qu'en a-t-il été les autres jours ? ajoute Pascal Rossignol. Tout cela n'a fait qu'attiser les tensions à la prison.»

 

Sodexo réagit

 

Pour sauver son contrat avec l'administration pénitentiaire, Sodexo a pris des mesures. «Il s'agit d'une erreur humaine intolérable. Nous devions réagir vite», indique le délégataire. La société a accéléré la mise en place d'un plan de maîtrise sanitaire au sein de la prison.

 

Des règles de qualité et de sécurité auxquelles les personnels et détenus en poste dans les cuisines sont actuellement formés. 

 

Rébellion
Le 24 février dernier, une trentaine de détenus du centre pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier avaient refusé de regagner leurs cellules et dégradé les grilles de la cour de promenade. Les Équipes régionales d'intervention et de sécurité (Éris) de Lyon et Dijon avaient dû être appelées en renfort. 

 

Leur presse (Élisa Frisullo,
20 Minutes), 9 mars.

 

 

Saint-Quentin-Fallavier (38) : Mutinerie maîtrisée

 

Ce jeudi 24 février dans la matinée, des détenus ont refusé de regagner leurs cellules. Ils ont été maîtrisés.

 

Une trentaine de prisonniers qui refusaient de rentrer de leur «promenade» ont finalement regagnés leurs cellules après plusieurs heures suite à l'intervention des forces de l'ordre. Motif de la colère, selon nos informations, l'alimentation jugée avariée et le manque de choix à «l'épicerie».

 

La muterie a débuté en matinée dans deux cours du centre pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier. Les détenus ont opposé une résistance aux gardiens, à l'heure de prendre la direction des cellules. Armés de grillages et de barres récupérés dans une clôture, ils ont tenu tête une bonne partie de la journée.

 

Des gendarmes à bord de plusieurs fourgons ont été dépêchés en nombre et membres de l'Équipe Régionale d'Intervention et de Sécurité sont également intervenus.

 

En tout début d'après-midi, une partie des détenus a pu être maîtrisée. Des tirs de dissuasion ont été entendus de l'extérieur, plongeant les familles dans la peur. C'était en effet jour de parloir à Saint-Quentin. Deux ambulances sont également arrivées sur place.

 

Après cet épisode les derniers prisonniers ont accepté de regagner l'intérieur.

 

Selon un syndicaliste FO, gardien au centre pénitentiaire, la grogne montait depuis quelques jours dans la prison. Des détenus ayant visiblement trouvé des aliments avariés dans les rations quotidiennes et se plaignant du peu de choix proposé à «l'épicerie». 

 

Leur presse (Franck Grassaud,
France 3 Alpes), 25 février.

 

 

Isère : une trentaine de détenus refusent de regagner leurs cellules

 

Une trentaine de détenus de la prison de Saint-Quentin-Fallavier, en Isère, ont refusé pendant quelques heures jeudi de regagner leurs cellules, nécessitant l'intervention des Équipes régionales de sécurité (Éris), a-t-on appris de sources pénitentiaire et syndicale.

 

«En fin de matinée, ils ont refusé de remonter après la promenade. Devant leur opposition à regagner leurs cellules et après la dégradation de la grille de promenade par quelques prisonniers, les Eris sont arrivées», a expliqué à l'AFP Daniel Carré, de l'UFAP-Unsa-Justice.

 

Les raisons de cette grogne restaient indéterminées, selon le syndicaliste et la direction des services pénitentiaires.

 

Quarante membres des Équipes régionales d'intervention et de sécurité de Lyon et de Dijon, formées pour le maintien de l'ordre en prison, sont alors intervenus et ont forcé «sans incident» les détenus à réintégrer leurs cellules, a poursuivi M. Carré selon lequel tout est rentré dans l'ordre vers 15h30.

 

Selon le syndicaliste, ces incidents surviennent «dans un contexte de surpopulation pénale et de manque d'effectifs de personnel».

 

Leur presse (Agence Faut Payer), 24 février.

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14 mars 2011 1 14 /03 /mars /2011 10:39
 [Dan, Olivier et Camille ont été arrêtés la nuit du 12 
 au 13 janvier 2011

à Belleville (Paris) suite à des tags comme « Algérie –
 Tunisie /

Insurrection », « Vive l’anarchie »... Après un début
 de garde à vue dans

le commissariat du XXe arrondissement, les flics de la
 crim du 36 quai des

orfèvres se sont emparés de l’affaire et les ont
 transférés dans leurs

locaux. La juge d’instruction Patricia Simon, a
 ensuite décidé de les

envoyer en prison. Depuis, Camille est sous contrôle
 judiciaire, Olivier

et Dan sont à La Santé depuis presque 2 mois (le premier
 repasse devant la

juge d’instruction Simon pour interrogatoire le 11 mars
 et Dan le 21

mars)...

Officiellement, l’instruction ne concerne que les tags
 (des « dégradations

en réunion »), la violation du contrôle judiciaire précédent
 (leur

interdisant de se voir) et les divers refus de signalement
 (empreintes,

ADN). Pourtant, cette même Patricia Simon est comme par
 hasard chargée de

plusieurs dossiers montés par la Crim’ du 36 quai des
 Orfèvres à propos

d’attaques et de manifestations contre la machine à
 expulser à Paris.

Pour rappel, Olivier et Dan, avaient déjà été mis en
 examen dans le cadre

de la lutte contre la machine à expulser en février 2010
 (l’un accusé de

tags dans une BNP, l’autre d’une tentative d’incendie
 d’un distributeur de

billets) puis Olivier encore une fois en juin 2010
 (accusé d’avoir acheté

une bombe de colle qui aurait pu servir lors d’une
 occupation d’Air

France).

Enfin, suite à plusieurs petits combats avec l’Administration

Pénitentiaire, Dan a obtenu une cellule individuelle et
 changé de division

(toujours à La Santé). Comme rétorsion, les matons se
 sont comme par

hasard débrouillés pour égarer sa carte de circulation
 interne samedi

dernier, contraignant sa famille à effectuer un parloir
 avec hygiaphone,

avant de la retrouver juste après. La lutte et la
 solidarité continuent,

dedans comme dehors...]



________________________________________________________





Partout : deuxième lettre de Dan depuis la prison
 de la Santé



»Peu importe de marcher quand on a des ailes
 pour voler »



Comme toujours, alors que le pouvoir nous promet
 l’apocalypse en tentant

de couper court à toute velléité de transformation
 sociale des rapports à

coups d’incarcérations, de harcèlement judiciaire,
 d’interdictions de

communiquer et de dispositifs de surveillance aux
 ridicules prétentions

d’omnipotence, la lutte continue et les rencontres
 brisent l’isolement de

ceux que l’on cherche à écraser en silence ; car
 dans un monde de

dominations, la liberté et son combat ne peuvent
 que rompre ce silence de

mort qu’ils souhaiteraient voir régner parmi ceux
 pour qui cette vie de

servitude est insoutenable.



Dans la révoltes à l’intérieur des prisons pour
 étrangers à travers

l’Europe [1] comme dans les mouvements insurrectionnels
 massifs au Maghreb

et au Moyen-Orient, sonne le même cri de colère
 : la liberté entière,

immédiate et inconditionnelle.

Partout la volonté de faire sauter la dernière
 arche, partout les mêmes

cris de rage, partout ce même amour de la vie.
 Mais partout aussi les

sirènes hurlantes de la répression, le bruit des
 clés dans les portes

blindées, le coup de marteau cinglant du juge qui
 te prive de ta liberté,

le coup de matraque du flic qui vient stopper ton
 élan, le coup de feu

assourdissant du militaire qui vient transpercer
 tes rêves ou le coup de

tampon du préfet qui te reconduit à la frontière.

Partout s’oppose à la lutte contre l’existant,
 l’arsenal du statu quo,

qu’il soit juridique, militaire, politique ou
 citoyen. On brise, on isole,

on désigne. « Terroriste », « criminel »,
 « marginal », « déséquilibré »,

»saboteur », « clandestin », « despérado »,
 « extrémiste ».

Quelle soit démocratique ou dictatoriale, partout
 l’usine à gaz judiciaire

et policière sévit là où elle sent que son règne
 s’effrite, partout où la

haine rentrée de l’oppression éclate au grand jour,
 se partage et se

transforme en une joie incontrôlable, celle remplie des
 rires et des

larmes de bonheur des bienheureux brisant leurs chaînes,
 poignardant

l’ennui d’une morne vie ; l’échine courbée dans un
 atelier, l’esprit

enfermé dans un 17 mètres carré, les mains attachées
 dans un commissariat

dégueulasse ou les poches vidées dans un étal de
 marchandises convoitées.



Alors ça vole, ça pille, ça rigole, ça réapprend
 à courir pour de bonnes

raisons, ça tire la langue,ça refuse et ça jette
 des pierres là où l’on

souhaiterait nous voir prostrés dans la frustration
 d’une vie sans vie,

trop courte, trop longue. Dans le faux décorum d’une
 paix sociale négociée

par d’autres que nous.

Mais la beauté se trouve du côté de ceux qui se
 révoltent.



Dans une période de « crise » où les gens ont de moins
 en moins de choses à

perdre, le pouvoir ne peut que craindre tout élan de
 liberté réelle. Je ne

parle pas des éternelles Cassandres de la gauche,
 qu’elles soient

parlementaires ou de Tarnac [2] ; je ne parle pas
 de toux ceux ceux qui

voudraient nous faire croire que pour se débarrasser
 de tout pouvoir, il

faudrait d’abord y accéder, ni de tous ceux qui
 pensent qu’il faut se

contenter des armes que nous concèdent ceux au
 pouvoir pour mener nos

luttes, non, ne soyons pas si pessimistes et
 résignés.

Soyons infidèles, incontrôlables et ingouvernables.



Il paraît clair, en ce qui me concerne, qu’Olivier et
 moi ne sommes pas en

prison pour quelques tags, ni même pour un non respect
 d’obligations

judiciaires, nous sommes incarcérés en raison d’un
 rêve que nous portons

profondément dans nos coeurs, l’absence totale
 d’autorité, la volonté de

combattre la mort qu’est cette vie que l’on veut
 nous faire endurer, et

parce que nous n’avons jamais hésité à prendre
 
 la rue pour en discuter,

pour exprimer ces désirs de liberté à tous ceux
 qui voulaient bien en

discuter avec nous et les partager. Nous sommes
 incarcérés pour ce que

nous sommes, non pas pour ce que nous avons ou
 aurions fait, ce ne sont

que des prétextes.



Le fait que tout continue, que les discussions,
 tables de presse, débats,

nouvelles rencontres et actions ne fassent que
 se multiplier depuis nos

arrestations montre bien que pour étouffer nos
 révoltes et nos

solidarités, les pouvoirs en place et le pouvoir
 en général ne pourront

qu’abdiquer ou être détruits, et les dernières
 révoltes dans les pays

arabes nous montrent aussi que ce désir est
 plus fort que les balles,

aussi vrai qu’il voyagera toujours à travers
 barreaux et panoptiques.



Spéciale dédicace à tous ceux qui, en Libye
 comme ailleurs, jouaient en

cachette aux fléchettes sur les portraits de
 leurs oppresseurs et qui

aujourd’hui jouent avec d’autres armes, et
 le rire aux lèvres.

Une autre pour tous ceux qui ne restent pas
 au chaud malgré la répression,

rage et courage !



Ni patries, ni frontières, ni nations.

Ni justice, ni paix.



Liberté. Partout !



4 mars 2011, depuis la Maison d’Arrêt de La Santé,

Dan



PS : Vous pouvez toujours m’envoyer vos pensées,
 de la manière que vous

estimerez la plus adéquate, et notamment par
 courrier en français ou

anglais à : Sayag Daniel - n° 293350 - 42 rue
 de la Santé - 75 674 Paris

cedex 14



[1] ... comme par exemple à Vincennes près de
 Paris, Gradisca, Trapani,

Turin et Modena en Italie, ou Steenokkerzeel
 à Bruxelles, où les

sans-papiers enfermés en centre de rétention
 se sont révoltés fin février,

incendiant leurs cages, s’évadant et saccageant
 le mobilier.



[2] Cf. la proposition des « 10 de Tarnac »
 adressée à la bourgeoisie dans

son journal préféré, Le Monde du 25 février
 2011, où ils proposent à

Sarkozy de s’exiler dès maintenant (mais aussi
 où ils tentent encore une

fois de récupérer des camarades et compagnons,
 tout en minimisant à chaque

fois les faits que l’Etat reproche à
 ces derniers, et en les sortant de

leur contexte de lutte).
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1 mars 2011 2 01 /03 /mars /2011 01:11

Des nouvelles des sans-papiers enfermés dans le camp de Vincennes, joints au téléphone.
Puis des nouvelles italiennes.



Centre de rétention de Vincennes, samedi 26 février 2011

"Je suis au CRA 1, cela fait 5 jours qu'on est en grève de la faim. je
parle pas de moi, on est tout le monde en grève, sauf deux ou trois
personnes qui sont allés manger. On fait cela parcequ'on en a marre.
Marre qu'on nous réponde toujours non à tout ce qu'on demande. Non, non,
non pour voir l'infirmière, non pour tout. Et surtout on est en grève de
la faim contre les expulsions. On est des algériens, des tunisiens, des
marocains, des lybiens, là bas y'a les dictatures, on veut pas partir.
Hier la police est venue en renfort, c'était la BRB. A un moment, on
était dans un endroit et ils nous ont demandé de bouger. Y'avait un mec
qui écoutait son mp4, alors il a pas entendu. Un flic super balaise,
alors que lui est tout maigre, s'est jeté sur lui, il l'a levé et il l'a
étranglé, ses yeux sortaient, et après il l'a jeté en l'air sur
plusieurs mètres, super loin. Le mec il lui ont cassé les côtes. Il
était trop mal, il est parti à l'hôpital ce matin. Je sais qu'hier il y
a eu un incendie dans une chambre du bâtiment, l'électricité était
coupée, les pompiers sont venus. Il y avait aussi un helicoptère de la
gendarmerie qui survolait le centre, je sais pas si il y a eu des
évasions ou des tentatives ou quoi. Je sais pas comment c'est dans les
autres bâtiments mais hier ils sont sortis comme nous dans la cour. On a
tous crié liberté, liberté."


Centre de rétention de Vincennes, dimanche 27 février 2011

"Hier on a parlé aux journalistes. On a parlé de la grève de la faim sur
un journal à télé 16 et sur beur FM."

On lui parle de la dépêche afp sortie hier*.

"C'est pas vrai que des gens arrêtent la grève de la faim. Y a des gens
qui sont au lit. Ils sont faibles. Y a pas le médecin, il n'y a que
l'infirmière et les policiers.

Ils nous interdisent les appareils photos et les cameras sur les
téléphones, pour qu'on mette pas des choses sur internet, pour pas que
l'info sorte.

Demain l'ASSFAM va venir parler avec nous. C'est pas une assistance, ils
sont d'accord avec les policiers. On parle avec eux, ils te disent
d'accord et puis ils font rien.

Le chef du centre, lui, il est pas venu. Il envoie juste les renforts de
police.

Ce qu'on veut c'est que ni Marocains ni Maliens ni Algériens ni
Tunisiens ni Sénégalais ni personne, ne parte en expulsion. On veut pas
de reconduite à la frontière. Y a eu des expulsions d'Algériens
avant-hier. Y en a qui doivent être expulsés demain.

C'est bien que vous soyez avec nous, faut continuer à nous soutenir. On
est solidaires."
 
fermeturetention@yahoo.fr
 
*
http://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5gwsl9E3RlEG5tPadEEPzvNaaJkTg?docId=CNG.9f0f7a83947ee2cab3ec11b2b758add8.5e1

 

 

 

 

Message du 25 février 2011
 
Alors que l'Italie tremble en attendant un "déferlement" de 100 à 200 000 "barbares" voir plus et que frontex vient d'y installer un camp de guerre baptisé Hermès 2011, lesdits barbares qui ont réussi à pénétrer dans la péninsule s'organisent :
Ainsi à Ragusa ce sont 33 personnes semi enfermées dans un centre dit d'accueil qui ont pu s'échapper la nuit dernière.
A Gradisca hier matin plusieurs dizaines de prisonniers du CIE (centre d'identification et d'expulsion) se sont révoltés, ont incendié plusieurs chambres et endommagé une partie du centre. 5 d'entre eux ont été inculpés pour ces faits et transférés de la prison pour étrangers à la prison pour tous.
Au CIE de Trapani plusieurs dizaines de personnes (des jeunes magrébins disent les autorités)  ont égalemnt protesté énergiquement contre leur enfermement, endommageant sérieusement le mobilier de leur prison.
Dans les centres de rétention de Turin et Bari des tentatives d'évasion ont également eu lieu mais n'ont pu aboutir et ont malheureusement entrainé des inculpations.
A Bari une manifestation en solidarité avec les retenus en révole aura lieu demain devant le centre de rétention.

 

 

Message d'aujourd'hui, 28 février 2011
 
En ces temps un peu mornes où les dispositifs guerriers de contrôle aux frontières sont en train de se renforcer en Mediterranée d'une façon qu'on nous présente comme temporaire mais qui sera sans doute durable et exponentielle, voici quelques nouvelles un peu rafraichissantes.
Elles nous viennent d'Italie, où, alors que des casernes ont été prévisionnellement réquisitionnées pour enfermer les personnes qui auraient réussi à franchir la mer méditerranée, les prisonniers des centres de rétention continuent de se révolter et de de nuire aux dispositifs d'enfermement qui leurs sont réservés.
Ainsi, à Gradisca on peut dire qu'à l'heure d'aujourd'hui, cage après cage, chambre après chambre, le centre de rétention a été complètement détruit. Une seule chambre avec 8 lits est utilisable et depuis hier les 105 prisonniers sont répartis à même le sol dans les parties communes du centre encore viables, en attendant certainement d'être transférés vers d'autres prisons ou relachés.
A Turin plusieurs personnes sont allées clamer la bonne nouvelle sous les murs du centre de rétention de la ville. Pétards, cris, slogans, battements contre les barreaux, poteaux et tout ce qui résonne , l'information a été fêtée conjointement à l'extérieur comme à l'intérieur.
A Modena, où une tentative d'évasion a malheureusement échoué dans la nuit de samedi à dimanche, un rassemblement a également eu lieu ce dimanche sous le centre de rétention aux cris de "Liberta ! Liberta !" Les manifestants et manifestantes ont pu entrer en contact avec les retenus parmi lesquels un important groupe de Tunisiens transférés de lampedusa. A l'intérieur une manifestation a également eu lieu avec la même clameur qui s'est élevée "Liberta !"et avec plusieurs départs de feu et le mobilier des chambres qui a été sorti dans la cour. Les flics et les gardiens sont intervenus  8 Tunisiens ont été emmenés on ne sait encore pas où.

En Italie comme ailleurs, un centre de rétention en moins c'est des centaines de gens qui ne seront pas arrêtés, enfermés, expulsés, c'est un petit air de liberté pour chacun et chacune d'entre nous.

Fait à partir de divers articles, notamment sur http://www.autistici.org/macerie/?p=28394

 




Centre de rétention de Vincennes, dimanche 27 février 2011

"Hier on a parlé aux journalistes. On a parlé de la grève de la faim sur
un journal à télé 16 et sur beur FM."

On lui parle de la dépêche afp sortie hier*.

"C'est pas vrai que des gens arrêtent la grève de la faim. Y a des gens
qui sont au lit. Ils sont faibles. Y a pas le médecin, il n'y a que
l'infirmière et les policiers.

Ils nous interdisent les appareils photos et les cameras sur les
téléphones, pour qu'on mette pas des choses sur internet, pour pas que
l'info sorte.

Demain l'ASSFAM va venir parler avec nous. C'est pas une assistance, ils
sont d'accord avec les policiers. On parle avec eux, ils te disent
d'accord et puis ils font rien.

Le chef du centre, lui, il est pas venu. Il envoie juste les renforts de
police.

Ce qu'on veut c'est que ni Marocains ni Maliens ni Algériens ni
Tunisiens ni Sénégalais ni personne, ne parte en expulsion. On veut pas
de reconduite à la frontière. Y a eu des expulsions d'Algériens
avant-hier. Y en a qui doivent être expulsés demain.

C'est bien que vous soyez avec nous, faut continuer à nous soutenir. On
est solidaires."
 
fermeturetention@yahoo.fr
 
*
http://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5gwsl9E3RlEG5tPadEEPzvNaaJkTg?docId=CNG.9f0f7a83947ee2cab3ec11b2b758add8.5e1

 

 

 

 

Message du 25 février 2011
 
Alors que l'Italie tremble en attendant un "déferlement" de 100 à 200 000 "barbares" voir plus et que frontex vient d'y installer un camp de guerre baptisé Hermès 2011, lesdits barbares qui ont réussi à pénétrer dans la péninsule s'organisent :
Ainsi à Ragusa ce sont 33 personnes semi enfermées dans un centre dit d'accueil qui ont pu s'échapper la nuit dernière.
A Gradisca hier matin plusieurs dizaines de prisonniers du CIE (centre d'identification et d'expulsion) se sont révoltés, ont incendié plusieurs chambres et endommagé une partie du centre. 5 d'entre eux ont été inculpés pour ces faits et transférés de la prison pour étrangers à la prison pour tous.
Au CIE de Trapani plusieurs dizaines de personnes (des jeunes magrébins disent les autorités)  ont égalemnt protesté énergiquement contre leur enfermement, endommageant sérieusement le mobilier de leur prison.
Dans les centres de rétention de Turin et Bari des tentatives d'évasion ont également eu lieu mais n'ont pu aboutir et ont malheureusement entrainé des inculpations.
A Bari une manifestation en solidarité avec les retenus en révole aura lieu demain devant le centre de rétention.

 

 

Message d'aujourd'hui, 28 février 2011
 
En ces temps un peu mornes où les dispositifs guerriers de contrôle aux frontières sont en train de se renforcer en Mediterranée d'une façon qu'on nous présente comme temporaire mais qui sera sans doute durable et exponentielle, voici quelques nouvelles un peu rafraichissantes.
Elles nous viennent d'Italie, où, alors que des casernes ont été prévisionnellement réquisitionnées pour enfermer les personnes qui auraient réussi à franchir la mer méditerranée, les prisonniers des centres de rétention continuent de se révolter et de de nuire aux dispositifs d'enfermement qui leurs sont réservés.
Ainsi, à Gradisca on peut dire qu'à l'heure d'aujourd'hui, cage après cage, chambre après chambre, le centre de rétention a été complètement détruit. Une seule chambre avec 8 lits est utilisable et depuis hier les 105 prisonniers sont répartis à même le sol dans les parties communes du centre encore viables, en attendant certainement d'être transférés vers d'autres prisons ou relachés.
A Turin plusieurs personnes sont allées clamer la bonne nouvelle sous les murs du centre de rétention de la ville. Pétards, cris, slogans, battements contre les barreaux, poteaux et tout ce qui résonne , l'information a été fêtée conjointement à l'extérieur comme à l'intérieur.
A Modena, où une tentative d'évasion a malheureusement échoué dans la nuit de samedi à dimanche, un rassemblement a également eu lieu ce dimanche sous le centre de rétention aux cris de "Liberta ! Liberta !" Les manifestants et manifestantes ont pu entrer en contact avec les retenus parmi lesquels un important groupe de Tunisiens transférés de lampedusa. A l'intérieur une manifestation a également eu lieu avec la même clameur qui s'est élevée "Liberta !"et avec plusieurs départs de feu et le mobilier des chambres qui a été sorti dans la cour. Les flics et les gardiens sont intervenus  8 Tunisiens ont été emmenés on ne sait encore pas où.

En Italie comme ailleurs, un centre de rétention en moins c'est des centaines de gens qui ne seront pas arrêtés, enfermés, expulsés, c'est un petit air de liberté pour chacun et chacune d'entre nous.

Fait à partir de divers articles, notamment sur http://www.autistici.org/macerie/?p=28394

 

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